Je n’étais pas revenu par ici depuis bien longtemps. Je parlais
des livres pour affûter ma plume. J’avais l’espoir fou qu’un jour d’autres
plumes parleraient de mes livres.
Depuis, je n’ai guère raturé que quelques pages ici ou là.
Rien de bien glorieux et j’avais oublié un peut mes aspirations d’écriture. Je
n’ai guère plus de mémoire qu’un moineau. Et le propre des choses que l’on
oublie, c’est de ne pas s’en souvenir. Sans compter que dans notre nid, nous vivons
à l’étroit maintenant. Il a fallu faire de la place pour un petit oisillon. Un
oisillon qui occupe l’essentiel de mes heures.
L’oisillon dort et rêve. J’en profite pour reprendre la
plume pour parler à nouveau d’un livre. Bien souvent, je classe les romans en
fonction du plaisir que j’ai éprouvé à les lire. Je leur colle entre une et
cinq étoiles puis je les range dans l’oubli poussiéreux de ma bibliothèque. La
plupart des livres restent bien sages sur leurs étagères dans l’attente de
trouver un nouveau lecteur. Il est d’autres gentils fantômes qui s’échappent de
leur rayonnage pour continuer à me hanter.
Je suis revenu pour vous parler de l’un de ces ouvrages. Ne
tirez pas sur l’oiseau moqueur de Harper Lee mérite les lauriers que lui a
tressé la postérité. Attention, chef d’œuvre !
Les livres qui me font rêver se répartissent eu deux grandes
catégories. Ceux qui m’ont passionné pendant la lecture. Dans ces cas là, je
brûle de savoir ce qu’il va arriver aux protagonistes, de résoudre les mystères,
de découvrir de nouveaux horizons, d’apprendre des choses. Bref, j’aime ces
livres car le récit me capture.
Et puis il y a ces autres romans, ceux qui persistent une
fois la dernière page tournée. Ces livres là nous font réfléchir, ou bien ces
univers ou ces personnages continuent de vivre dans nos têtes. Bref, j’aime ces
livres car le récit ne nous libère pas.
Bien souvent, les bons livres combinent ces deux
caractéristiques à des degrés divers. Je viens de terminer le chef d’œuvre de
Harper Lee et je le range avec tendresse dans la deuxième catégorie. Tout comme
Sur la route De Kerouac, Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur ne brille pas par son intrigue. C’est une histoire douloureuse de haine et d’injustice.
Dans les Etats-Unis d’Amérique, les hommes ne naissent pas toujours libres et
égaux. Certains états du sud n’ont visiblement pas saisi que la guerre de sécession
leur avait donné tort. Bref, le récit est prenant, fort. Il laisse des marques,
des séquelles.
Mais je persiste, l’intrigue contribue au récit mais je ne
pense pas que ce soit la première qualité du livre. A moins de d’avoir vécu
toute sa vie au milieu des lamas, on sait qu’avoir la peau noire n’aide pas à s’épanouir
le long du Mississipi.
Non, j’ai donné cinq étoiles à ce superbe livre à cause d’une
nostalgie contagieuse. Je m’y suis plongé pendant quelques centaines de pages
et j’ai désormais l’impression de connaître intimement la vie dans les petites
villes du sud des Etats-Unis. Comme si j’y avais vécu ma propre enfance. J’ai l’impression
de connaître Jem et Scout Finch. Et je me surprends parfois à souhaiter à avoir
de leurs nouvelles.
C’est un récit universel qui parle avant tout de la fin de l’enfance.
Confrontée au monde des adultes la jeune Marie-Louise ‘Scout’ Finch n’a pas
encore les clefs pour comprendre la société dans laquelle elle vit.
La jeune narratrice découvre le monde avec un regard d’enfant.
Ce garçon manqué n’est pas la petite ‘dame’ que la bonne société voudrait qu’elle
devienne. Elle est effrontée, bagarreuse, terriblement intelligente. Parfois,
on se perd un peu face au personnage qui nous raconte ses histoires. Est-ce qu’il
s’agit d’une petite fille qui commence l’école, ou est-ce la narratrice devenue
adulte qui se rappelle de ses jeunes années.
Il y a Jeremy ‘Jem’ Finch. Le grand frère qui sait tout et
qui protège. Lui commence à s’éloigner de l’enfance. Il regarde le monde de l’autre
côté du rideau de pluie de l’innocence.
Les deux enfants sont élevés par Atticus Finch, cet avocat qu’aucun
des deux enfants n’ose appeler papa. La figure paternelle est l’un des notables
de la petite ville de Maycomb, Alabama. Il est avocat et s’efforce d’élever
seul ses enfant en leur montrant ce qui est juste. Son humanisme flamboyant se
révèle le jour ou il est commis d’office pour défendre un noir accusé d’avoir
violé une blanche.
Et puis il y a tous ces personnages qu’on aurait tort de
considérer comme secondaire. Dill, l’amoureux fantasque de Scout qui revient
tous les étés passer les vacances à Maycomb. Il y a le mystérieux Boo Radley
qui n’est plus sorti de sa maison depuis des années, la terrible Mme Dubose, et
tellement d’autres.
Ils ne sont ni gentils, ni méchants mais avant tout humains
et donnent une véritable vie au roman.
Tout a été écrit sur ce roman, il est grand temps de
refermer cette chronique.
Cela faisait quelques années que je n’avais attribué cinq
étoiles à un livre, mais ma voix n’a pas beaucoup de force. Ne tirez pas sur l’oiseau
moqueur est devenu un classique récompensé par le prix Pulitzer, hissant Harper
Lee au milieu des plus grands écrivains américains comme Faulkner, Hemingway ou Normal
Mailer.
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