mardi, décembre 30, 2008

Le père noel est passé, la dernière revue de décembre aussi...

Le père noël est passé, mais dans sa hotte rien de culturel cette année. Des appareils de cuisine, c'est pour dire. Vu que j'adore cuisiner, j'en suis ravi. Mais en attendant de préparer des bon petits plats, voici un peu de nourriture pour l'esprit. Ce sera sans doute ma dernière revue de livre de l'année. Au menu, deux monstres sacrés de la littérature américaine.

Je suis tout d'abord revenu à Truman Capote. J'avais été très déçu de sa traversée de l'été comme je l'ai déjà dit et je ne souhaitais pas rester sur cette mauvaise impression d'un roman de jeunesse. J'ai donc lu le roman que beaucoup considèrent comme son chef d'oeuvre, de sang froid. Le livre présente le quadruple meurtre d'une famille de fermiers du Kansas, fait d'hiver sanglant mais profondément banal. L'affaire aura choqué les esprits et la région rurale vivra dans la peur pendant de nombreux mois en attendant que les coupables soit arrêtés.
Truman Capote s'est livré à un travail colossal pour reconstituer les différents aspects de l'affaire. Une minutie et un soin du détail qui transpirent sous les pages. L'histoire se divise ainsi en quatre grande parties. Tout d'abord l'exposition des personnages et notamment les victimes, la petite vie tranquille d'une famille de fermiers durant sa dernière journée et en parallèle les faits et gestes des assassins en devenir. Ensuite l'auteur nous présente les effets du massacre sur la population, la mise en place d'une enquête difficile et la cavale des meurtriers. Il est notable de constater qu'entre le avant et le après le quadruple meurtre, une ellipse importante est faite sur l'acte en lui même et ses causes. Ce qui tient le lecteur en haleine. La troisième partie voit la résolution de l'enquête policière grâce à un témoignage providentiel d'un détenu qui aurait fréquenté les meurtriers. On sait enfin le pourquoi et le comment de l'histoire. Enfin la dernière partie relate le procès des accusés et leurs derniers jours en prison avant l'exécution.
Si cette grande organisation facilite la vie au lecteur et le tient en haleine, la structure même du récit est déroutante. Pionnier de l'effet de conscience, Truman Capote passe d'un personnage à l'autre pour suivre le fil de leurs activités en parallèle sans répit. Mais pire, parfois il ouvre des parenthèses intéressantes mais qui coupent le fil du récit. L'histoire est parsemée de flashback sur la vie des assassins, sur la prise en compte de la psychiatrie dans les procès du Kansas. Au final on se trouve devant un livre étrange, enfantement bizarre du roman et du documentaire.
C'est assez bien écrit mais sans être exceptionnel, l'écrivain préférant nous présenter des faits détaillés que de se laisser aller à des envolées lyriques. Malgré l'atrocité de leur crime et la profonde futilité le l'acte les assassins deviendront finalement humains, malheureux voleurs qui venaient pour l'argent et qui n'auront récolté que quatre misérables dollars.
En bref, ça se laisse lire, mais sans être exceptionnel.

Un deuxième monstre sacré aura occupé mes lectures de décembre. C'est dans le jazz des années folles de l'entre deux guerres à New York que j'ai retrouvé Gatsby le magnifique de Fancis Scott Fitzgerald. L'histoire se passe en 1922, le narrateur venu du middle west pour faire fortune à New York vit dans la périphérie et c'est par hasard qu'il loge dans la banlieue sur un terrain jouxtant la propriété de Gatsby. Gatsby est immensément riche, il organise tous les soirs des fêtes grandioses ou malgré la prohibition tout la jet set vient noyer son insouciance dans le jazz et l'alcool. Un touffu mystère est entretenu sur l'origine de la fortune de Gatsby, son passé et ses liens présumés avec les organisations criminelles. Un sujet de conversation intarissable pour les fêtards qui vivent à ses crochets.
Très rapidement le narrateur deviens l'ami de Gatsby et découvre son but dans la vie, retrouver et séduire la jeune femme dont il était amoureux. Mais cette séduction lui sera fatale. Il mourra seul et sans amis.
Ça ressemble furieusement à l'une de ces mièvres comédies romantiques que j'exècre, mais allez savoir pourquoi cette histoire m'a touché, peut être par son ambiance.

Allez hop, il est temps de terminer mes bagages. L'oiseau migrateur s'en va célébrer la nouvelle année sur l'hémisphère sud.

lundi, décembre 08, 2008

Des crocodiles diaboliques...

J'ai la chance dans mon appartement de posséder un poêle à bois comme principal moyen de chauffage. Comme son nom l'indique, le bois alimente la machine. Pour éviter des allers/retours incessants au stock de bois de chauffe à l'extérieur, je peux empiler quelques buches sous le poêle. Ma table de chevet fonctionne sur le même principe. Juste en dessous se trouve un espace ou j'entrepose mes livres en attente comme autant de combustible pour réchauffer l'imaginaire. Mais le stock de papier imprimé s'en allant diminuant, j'ai du m'armer de ma carte bleue comme d'une hache pour m'aventurer sur dans les forêts obscures de rayonnages libraires. Dans mon petit cabas, j'ai donc ramené quelques livres et voici la critique des deux premiers.

En ce qui concerne le premier, j'ai décidé de mettre de côté mes penchants littéraire pour sciemment acheter un roman de gare. En l'occurrence il s'agissait d'un livre d'épouvante, le diable en gris de Graham Masterton. L'auteur représente, équivalent écossais de Stephen King produit des livres faciles à lire, qui ne laisse pas beaucoup de souvenir mais qui passent agréablement le temps. Je n'ai pas vraiment acheté ce livre pour faire passer le temps, plutôt pour m'instruire. Comment un maitre du genre fait monter le suspense et l'horreur avec de simples mots. De plus l'intrique se déroulait dans les états du sud américain, tout comme ma propre histoire.
La promesse du roman était tenue, un livre facile à lire ou petit à petit l'angoisse monte et noue les tripes du lecteur dans un scoubidou sanglant. Parce que l'auteur n'est pas avare avec l'hémoglobine, c'est certain. Un chapitre sur deux du livre ou presque décrit un meurtre tout aussi sanglant qu'inexplicable. C'est le principe même de l'intrigue, des personnes sont assassinées en plein jour, avec des témoins dans des circonstances impossibles. Jamais personne ne peut voir l'assassin, et celui-ci ne laisse aucune trace. Difficile enquête en perspective pour l'inspecteur Decker. Il recevra de l'aide inattendue de la part d'une jeune enfant trisomique ainsi que de la femme de l'un de ses collègue, une médium. Le pauvre inspecteur affrontera également ses propres démons et fera la lumière sur le meurtre de sa femme qui eut lieu quelques années plus tôt.
Le noeud de l'affaire trouve ses racines dans la magie africaine et la guerre de sécession. C'est l'histoire d'une revanche au travers des siècles. En conclusion, ça se laisse lire. Contrairement à Stephen King, les tenants et aboutissants de l'intrigues ont beau être surnaturels, ils sont expliqués. On termine le livre avec l'impression de comprendre le pourquoi du comment. Pour autant, ce n'est pas un "bon" livre, la style est accrocheur mais pauvre, l'intrigue toute mystérieuse qu'elle soit suit les codes du genre et quelques incohérences viennent troubler la compréhension. Mais bon, ne boudons pas notre plaisir. D'autant plus que si le style de m'a rien appris, le fond du récit et les cultes Santeria sont une véritable inspiration pour ma propre histoire.

Le deuxième roman que je souhaite critiquer est le fruit du hasard et de la sérendipité. Je trainais mes guêtres dans les rayons de la littérature francaise, près des têtes de gondole lorsque mon regard fut happé par les couleurs éclatantes de la nouvelle collection Livre de poche. En effet sur le présentoir une sélection de livres dans des coffrets aux couleurs chatoyantes. Je me suis décidé pour les yeux jaunes des crocodiles de Katherine Pancol. Je n'avais pas bien lu la quatrième de couverture, j'aurais du y prêter plus attention. C'est en effet un roman purement féminin que celui là, à l'image des comédies romantiques insipides que nous servent les studios Hollywoodiens. Il ne s'y passe pas grand chose et les protagonistes ont des hautes pensées philosophico-psychologiques sur la vie en général et l'amour en particulier.
La lecture est sans saveur mais agréable, tout comme ces thés au citrons servis par les machines à café industrielles et dont le sucre masque l'absence de goût. La scène d'ouverture présente un appartement minable des banlieues ouvrières de paris. La femme reste à la maison pour s'occuper de la maison tandis que le mari végète dans une recherche d'un emploi inaccessible. La femme vient d'apprendre la liaison de son mari avec une esthéticienne du coin. Le roman débute lorsque la femme soumise met son mari à la porte et ça déclenche la dynamique de la narration. Comme d'habitude avec ce genre d'histoire, les plus malheureux ou les plus forts ne sont pas ceux que l'on croit. Les pauvres puisent dans leur misère la force de rebondir et les riches et puissants découvrent en eux une coquille vide. Le seul personnage qui m'a quelque peu surpris c'est la détestable fille ainée du personnage principal. Un rôle complexe et intéressant, un diamant perdu au milieu de la verroterie du livre.
Bref rien de neuf sous le soleil, mais ça ravira le public habituel. Comme ça se lit facilement, je l'ai rapidement expédié.

Il fait froid maintenant, il est temps de remettre du bois dans le feu, peut être de mettre aussi de nouveaux livres sous ma table de chevet, mais un meilleur combustible.

mardi, novembre 25, 2008

Revue de lecture pour en finir avec mes devoirs en retard...

Une revue de lecture copieuse ce mois ci. Je n'ai pas plus lu que d'habitude mais je souhaitais corriger un oubli. En effet, je n'avais pas encore parlé de tandis que j'agonise, le titre aurait du m'inciter à la méfiance. Je me suis presque mort d'ennui avec ce premier roman que je m'apprête à critiquer. Le souvenir pénible de la lecture s'est faufilé dans les rayonnages obscurs de ma mémoire, pour sombrer tranquillement dans l'oubli. Mais peine perdue, je l'ai retrouvé ce petit souvenir mesquin. Après avoir tant souffert à la lecture, je suis bien obligé de l'étaler. C'est une sorte d'exorcisme.
Revenons-en au livre, enfin d'abord à l'auteur, William Faulkner. Outre le fait d'avoir un nom assez évocateur, il fait partie du petit cénacle des prix nobels. Gage de qualité trompeur qui dissimule souvent les autels sanglants d'une idolâtrie snobinarde. Le personnage est également connu pour être le plus grand écrivain du sud des états unis (dixit la quatrième de couverture, vive les éditions folio), son penchant pour l'éthanol sous ses formes liquide ou pour son talent de scénariste. Enfin bref, ce n'est pas pour cela que je cherchais à lire du Faulkner, c'est surtout car le quidam a fondé sa réputation littéraire sur la création d'un compté imaginaire dans le Mississipi qui sert de décor à la plupart de ses écrits.
La description de la misère du siècle passé dans le Mississipi rural, voilà ce qui m'attirait chez Faulkner. J'espérais trouver une intéressante documentation pour mon propre travail d'écriture, dont l'action se déroule également dans les états américains du sud. Je cherchais le chef d'œuvre du romancier, Absalon, Absalon! Je ne l'ai pas trouvé alors par dépit j'ai choisi Tandis que j'agonise.
A ce sujet, un premier coup de gueule contre les éditions folio. Ces sombres éditeurs ont un penchant notable pour la quatrième de couverture fâcheuse. En l'occurrence,elle se contente d'être un extrait du livre. Paresse oblige, l'extrait n'a absolument rien de significatif. En sortant de la librairie avec le livre sous la poche, mis à part l'assurance que l'action se déroulait bien dans l'Amérique rurale, je ne savais rien du contenu. C'est le hasard qui a dicté mon choix, ainsi que la photographie présentée en première de couverture, une magnifique photo noir et blanc d'une famille américaine. Je pourrais aligner les lignes pour parler de cette photographie, le père de famille qui domine la verticale centrale, tranquillement adossé à une colonne de bois en train de rouler une cigarette dans sa salopette de paysan. Tout autour de lui sa famille, visiblement sa femme et ses deux filles fixent l'appareil photo. Les personnages semblent pauvres et démunis mais empreints d'une profonde majesté.
C'est malheureusement le meilleur moment du livre. L'intérieur nous présente effectivement une petite famille américaine vivant dans la misère, mais loin d'avoir cette majesté, les personnages sont présentés dans leur rusticité crasse. L'histoire nous raconte la mort d'Addie Bundren. Non, pas une mort passionnante, ni un crime à résoudre, juste la fin pathétique et morne d'une pauvre femme dans son lit, terrassée par la maladie. La seconde partie du livre se présente comme une farce de mauvais goût avec l'odyssée de la famille qui part enterrer la vieille dame. Une violente tempête à détruit les ponts pour se rendre à la ville alors les chapitres s'empilent pour nous raconter les péripéties du long chemin. Ils s'en passe des choses sur la route, des rencontres et des évènements improbables qui vont transformer l'enterrement en épopée mythique.
C'est très certainement bien écrit. Chaque chapitre nous présente le point de vue de l'un des personnages. Il paraît que c'est Faulkner à inventé cette technique littéraire du "courant de conscience", chacun des personnages avec sa propre perception des évènements, ses préoccupations intimes. Le style d'écriture s'adapte et polymorphe il se transforme d'un chapitre à l'autre. Même si Faulkner est l'inventeur de cette technique, force m'est de constater qu'elle a été reprise avec talent par d'autres. Que les élèves ont très largement dépassé le maitre. Là cela donne une tonalité erratique au récit, cela embrouille le lecteur et c'est surtout profondément soporifique.
Même si au cours du récit sont révélés les secrets des protagonistes, on s'ennuie ferme à la lecture. Et c'est avec soulagement que l'on accueille la dernière page.
Ouf, sauvé. Je crois que l'on ne m'y reprendra plus.

Deuxième petit livre du mois de novembre. Encore un prix Nobel, encore un détestable folio. Il s'agit Des souris et des hommes de John Steinbeck. Je ne peux m'empêcher d'adresser une nouvelle malédiction aux éditeurs. Encore une fois, c'est un extrait de texte présenté dans la quatrième de couverture. Mais cette fois ci, elle révèle une scène clef de la fin du livre. Tout comme ces fâcheux qui révèlent la fin des films à suspense, avec ce genre de confidence qui gâchent le spectacle, la quatrième de couverture a véritablement ruiné ma lecture. Si les prémisses du livre auguraient la conclusion fatale et les premiers chapitres présentaient déjà les minces filaments qui retenaient la lourde épée de Damoclès, je n'en aurais jamais la certitude et ça m'exaspère. C'est d'autant plus rageant que je tient le livre pour véritablement réussi. L'impression que j'ai ressenti donc en lisant le livre c'est d'avoir la certitude du drame à venir. Comme pour un roman tragique déjà lu et relu,on sait que le malheur va s'abattre mais on espère à chaque page que cette fois-ci, ce sera différent.
Contrairement à l'ouvrage précédent, ce livre est beaucoup plus mince, même pas deux cents pages. Le style est beaucoup plus simple, plus direct. Mais surtout contrairement au style de Faulkner, on ne pénètre jamais la conscience des personnages. La subtilité et la richesse de leurs caractères se révèle petit à petit au fil des dialogues. On apprend à connaître les protagonistes comme on le ferait dans la vrai vie, à force de les côtoyer, de leur parler, de découvrir leur vie au quotidien. Malgré leur simplicité et parfois leur grossièreté rustique, ils deviennent profondément humains et attachants. Entre le petit homme débrouillard et rusé et son ami, géant simple et naïf on pressent le drame à venir. Ils travaillent modestement, saisonniers dans les ranches, mais leurs rêves sont trop beaux pour être vrais. La dure réalité finira par les rattraper, les condamnant l'un et l'autre.
Une durable tristesse s'installe lorsque l'on termine le livre face au destin tragique des souris et des hommes. Je m'attendais à trouver une littérature engagée, à la façon des raisins de la colère. Pas du tout. Au contraire c'est une histoire toute simple, mais le pathos la rend si belle. Un livre à lire et à relire.

On change d'univers avec le troisième livre. On quitte la misère moite des campagnes américaines pour trouver les landes froides du Devonshire et les intrigues policières de Sherlock Holmes dans l'Angleterre Victorienne. Dans cet univers feutré de luxe, Sir Conan Doyle conte la légende du chien des Baskerville. Je n'avais lu aucun des romans de Sherlock Holmes et pour cause il sont très peu nombreux, la plupart des aventures du détective et l'enchainement magistral de ses déductions étant plus à leur places dans des nouvelles. Il y a quelques mois j'avais lu une reprise du célèbre personnage avec l'affaire du secrétaire Italien qui m'avait passablement déçu. L'original est souvent réputé meilleur que la copie, et puis je voulais me débarrasser de ce goût amer de la trahison dans la bouche. J'ai donc investi dans ce court roman.
Ai-je trouvé mon salut avec ce livre, pas vraiment. Bien entendu on retrouve la patte de Conan Doyle génial précurseur du roman policier. Mais on sent que l'auteur s'essouffle qu'il reprend à contrecœur son personnage pour satisfaire ses lecteurs. Et comme je le pensais, le support du roman est bien trop long pour que le lecteur soit époustouflé par l'esprit de synthèse du célèbre détective. On trouve donc un compromis étrange du roman d'aventure en suivant les pérégrinations du docteur Watson tandis que son compagnon est retenu à Londres pour d'autres affaires. Et lorsque le détective intervient, c'est pour commenter la difficulté de l'enquête. Ses déductions sont le plus souvent hasardeuses, elles ont perdu l'étincelle de génie qui les caractérisait dans mon souvenir. Ca se laisse lire, c'est même très bien écrit mais quelle amère déception de voir cette idole de mes lectures adolescente rabaissé ainsi.
Et pourtant l'intrigue était prometteuse, une malédiction ancestrale s'acharne sur la noble famille des Baskerville, un chien issu des enfers qui hante les paysages mystérieux des landes du Devonshire. Face au surnaturel, le rationnel Sherlock Holmes mène l'enquête. Sur le papier ça sonne bien, mais en pratique c'est décevant. Le mystère se dissipe en quelques pages, sans que le lecteur soit invité à affuter ses propres déductions. L'enquête se résout enfin dans une scène d'action assez déplacée. Pour une fois, ce n'est pas le cerveau qui triomphe mais les bras armés de revolver. C'est pour le moins frustrant.
Il est impératif que je retrouve les romans de mon enfances, c'est nouvelles qui m'avait passionné afin de découvrir si Conan Doyle s'est véritablement égaré ou bien si c'est moi qui ai vieilli en embellissant un souvenir trompeur.

Hop, pour une fois je suis à jour dans mes revues de lecture. L'esprit libéré, ma cervelle d'oiseau peut enfin s'envoler vers d'autres horizons littéraires.

mardi, novembre 11, 2008

Un oiseau des steppes


Il m'aura fallut du temps pour me résoudre à écrire cette petite revue de lecture. Je vais essayer d'évoquer Le loup des steppes, œuvre onirique phare du romancier de l'entre deux guerre Hermann Hesse.
Ce livre se présente comme un roman traditionnel mais sa dimension philosophique et même mystique transpire au travers du papier. De part la construction même, la première partie du livre n'est qu'une mise en abime et un jeu de miroirs complexe pour présenter le personnage principal, un certain Harry Haller. Un intellectuel petit bourgeois en révolte contre son milieu mais surtout contre lui même. Un loup des des steppes solitaire et perdu au milieu d'une époque qui ne lui correspond pas, ou la société décadente et superficielle s'enivre de rêve de revanche et de destruction. En effet, le contexte de l'Allemagne dans l'entre-deux-guerre teinte d'une noirceur amère le roman. Harry est malheureux mais plus que ça, il se déteste au point qu'il finira par se résoudre au suicide.

Au moment ou il se décide enfin à mettre fin à ses jours, il rencontre son alter égo féminin. Une femme mystérieuse et fatale qui l'initiera aux plaisirs de la vie, de la superficialité et à la frivolité. Mais la jeune femme, derrière les apparences et son insouciance comprend la torture intérieure de Harry, elle ressent la même. Après lui avoir appris à vivre elle lui demandera de la tuer. La toute dernière partie du livre soulève enfin un peu le voile sur les thématiques mystiques annoncées en préambule. Le théâtre magique et les immortels, spectacle réservé aux insensés transparaissaient dès les premières pages, ce n'est que dans le final que Harry pourra s'y joindre et y perdre l'esprit.

Que dire après avoir terminé la dernière page. Je ne sais pas, je suis probablement passé à côté des enseignements du livre. Ce n'est pas forcément grave, au contraire. Par certains aspect ce livre m'a fait penser au cinéma de David Lynch. J'ai ressenti le frisson d'incompréhension, que le discours est tout simplement trop grand pour rentrer dans le support. C'est au spectateur de trouver sa propre vérité. L'important n'est même pas de trouver cette vérité, mais simplement de la chercher. Au fil du voyage initiatique de Harry, c'est le lecteur qui traverse son propre rite de passage.

Intéressant et certainement à lire. Le loup des steppes n'a pas vieilli avec les années.

samedi, octobre 18, 2008

Vol au dessus d'un nid de coucou

J'ai déjà dit tout le bien que je pensais de Denis Lehanne, cet auteur Bostonien que j'avais découvert pendant mes récentes pérégrinations américaines. J'avais également dis qu'il me faudrait peu de temps avant d'y revenir. Et voilà c'est fait. J'ai acheté Shutter Island car cela me démangeait trop. Et encore une fois j'ai passé un très bon moment. Il m'a fallu moins de trois jours pour venir à bout de ce roman.
Il faut dire que la quatrième de couverture est alléchante. Deux marshalls fédéraux se rendent à la fin des années cinquante sur l'ile de Shutter Island dans la baie de Boston. Leur mission, retrouver une patiente qui s'est enfuie de l'hôpital psychiatrique. Mais sur une ile, elle ne peut pas aller bien loin, si ? L'affaire se corse lorsqu'un ouragan arrive sur l'île, que l'électricité disparaît tombe et que les malades mentaux criminels et dangereux s'enfuient. L'enquête mènera les deux marshalls très loin dans le labyrinthe de la folie.
Changement de style radical par rapport à un dernier verre avant la guerre. Terminé la politique et le racisme. Terminé les luttes de pouvoirs et les sévices sexuels. On perd l'ironie et le cynisme, mais on trouve une histoire teintée de mystères et de peurs. L'écriture change aussi un peu, le style flamboyant disparaît au profit d'un style plus simple plus vivant et plus tourné vers l'action.
Au final, même si de mon point de vue ce livre n'est pas aussi bluffant que le dernier verre. Il se laisse lire et même mieux que ça, il entre au panthéon des très bon livres.
Je ne peux pas en dire grand chose de plus sous peine de révéler les secrets. La seule chose, assez rare c'est que je me suis moi même fait piéger et c'est toujours un délice de se faire surprendre par un écrivain.

Un oiseau des iles

jeudi, octobre 16, 2008

New York brûle-t-il ?

Octobre 2008, la réalité rattrape et dépasse la fiction. L'économie mondiale anéantie par des années de spéculation et de vie à crédit. C'est bien tout le problème avec les crédits, il faut un jour les payer. Nous vivons des jours sombres qui montrent bien le danger d'une fuite en avant éternelle. On sent qu'avec la crise américaine, l'histoire tremble. Peut-être qu'une nouvelle page va se tourner. Ou peut être que les harpies d'un capitalisme abrutissant trouveront une autre solution pour endormir la population pour encore quelques années. Je ne suis pas devin, encore moins économiste et les hautes sphères de la finance internationale m'échappent. Je ne me hasarderais donc pas à établir un pronostic. Je me contenterais de parler du livre que j'ai lu à mon retour des amériques. Le bûcher des vanités présente une analogie troublante avec la situation actuelle.

Bien sur l'échelle du livre se veut plus restreinte, c'est la déchéance d'un homme qui s'étale pendant près de milles pages. C'est aussi sa chute du firmament de Wall Street, des salons dorés ou les maîtres manipulent les puissants leviers qui font tourner le monde. Aujourd'hui il semblerait que ces maîtres du monde se retourne piteusement vers l'illusion honnie de l'état providence. Le gouvernement fera tout pour les sauver, ces braves financiers quitte à sacrifier un peu plus l'avenir du peuple. Dans ce beau pays de la liberté ou les gens sont libres de travailler au fast food passé soixante dix ans, ou les rues sont un toit normal pour les misérables, ou les mères de famille sont obligées de cumuler les emplois sous payés pour pouvoir survivre.
Enfin bref, ce n'est pas vraiment l'objet de mes propos. Dans le bûcher des vanités, Tom Wolfe ne nous expose pas seulement la fragilité du capitalisme derrière son armure d'orgueil. Il détaille les rouages du pouvoirs. Pas seulement le pouvoir superficiel qui émane de la célébrité et du luxe. Ce monde de l'illusion dans lequel baigne le protagoniste principal du roman. Le financier arriviste et talentueux de Wall Street va découvrir un autre pouvoir qui va le détruire. Un soir alors qu'il ramenait sa ravissante maîtresse chez lui, il va se tromper de route et se retrouver par malchance dans les quartiers malfamés du Bronx. Luttant pour s'enfuir d'un guet-apens, il va par mégarde écraser un noir. C'est alors que les rouages du pouvoir vont se mettre à le broyer. Les luttes d'influence terribles entre la communauté noire qui saisit le prétexte du racisme pour accuser une certaine justice blanche réputée aveugle, sauf quand il s'agit de protéger les siens. Justice qui pour se dédouaner et arranger les visées électorales ou amoureuses de ses personnels va mettre un excès de zèle à trouver l'homme de Wall Street et à briser ce symbole de l'intouchable. Entre les deux, le troisième pouvoir de la presse distribue les cartes et séduit ou punis ses favoris.
En bref, c'est une oeuvre majeure que ce bûcher des vanités qui brûle consciencieusement tous les miroirs et artifices de la coquetterie pour montrer une vérité crue et douloureuse. Bien sûr le livre n'est pas exempt de défauts, notamment avec la manie de l'auteur qui cherche à restituer phonétiquement tous les bruits où même les accents des personnes. Bien sûr certains aspects psychologiques des personnages ne sont pas crédibles, bien sûr certaines allégories sont trop longues. Mais malgré tout et malgré sa longueur le livre se dévore d'une seule traite.
Derrière ce monument, on découvre les facettes de la vie New Yorkaise dans toutes leurs complexités et leurs artifices.
C'est l'une des meilleures surprises de l'année pour moi. Avec la découverte de Dennis Lehane comme auteur de chevet. Je recommande plus que chaleureusement pour ceux qui veulent découvrir la culture américaine, sulfureuse et facinante.

Un oiseau perché à Central Park

dimanche, septembre 14, 2008

Des villes et des livres

Me voilà encore dans un train. Non pas le transport habituel vers les affres de la vie active. Pire, le train dans lequel j'écris ces lignes me ramène à trop grande vitesse chez moi après trois semaines de congés. C'est la fin des vacances et la grisaille météorologique s'accorde à mon caractère du moment.
Difficile de ne pas avoir le spleen après un congé de trois semaines et une virée dans les grandes villes du nord est américain. Montréal que je connaissais déjà un peu, Boston, New York et Washington. Entre chacune des villes, des heures de transport, et pour cause nous nous déplacions en bus. Pour moi le transport est synonyme de lecture mais avant de partir le problème récurent revenait à la charge, que choisir ?
J'ai donc tenté une nouvelle approche, la lecture touristique. Première étape, trouver des livres dont l'action se déroulait dans les villes visitées. Deuxième étape, les lire avant d'arriver pour créer un air de déjà vu teinté de nostalgie.
Au final ça n'a pas trop marché pour le côté tourisme. Par contre en sortant de mes habitudes littéraires, j'ai découvert de vraies perles.

Première étape de notre périple, Boston, ville chargée d'histoire, berceau des états unis. Premier livre, Un dernier verre avant la guerre de Denis Lehane.
J'aurais du me méfier, le quidam a vu trois de ses ouvrages adaptés au cinéma. Bien sûr Mystic River par le génial Clint Eastwood, mais aussi Gone Baby gone et bientôt Shutter Island. J'aurais du me méfier de ce nom que je ne connaissais pas, je me suis fait avoir.
Littéralement bluffé par ce livre, me voilà contraint d'ajouter un nouveau romancier à mon panthéon des écrivains préférés. Un véritable modèle pour quiconque veux écrire.
Ses personnages sont torturés, souvent marqués à vie par une enfance difficile. Mais ils restent toujours crédibles sans sombrer dans la caricature. Chez Denis Lehane, il n'y a pas de bons ou de méchants, juste une infinie palette de clair-obscur. Je ne rendrais pas hommage à ce superbe livre en le résumant maladroitement à une simple guerre des gangs. Il y a tellement plus, des pistes de réflexions sur le racisme ordinaire et sur la violence, sur la drogue et la pauvreté, sur l'atrocité des sévices sexuels sur mineurs, sur l'inégalité des chances au pays du rêve américain...
Le livre débute par une enquête de routine confiée à un couple de détectives privés, à savoir retrouver la trace d'une femme de ménage noire, disparue en emportant des documents confidentiels. Très rapidement l'affaire tourne au drame social et va déchirer la ville de Boston. L'histoire est ambitieuse mais remarquablement bien servie. L'écriture est admirable, à la fois drôle et caustique, elle devient par moment sombre et dramatique tout en gardant une redoutable efficacité pour décrire les scènes d'action et les combats.
J'ai véritablement passé un bon moment à lire ce livre et c'est de la très bonne came. Pour preuve, je suis déjà en manque.
Enfin bref, avant d'arriver à Boston j'avais déjà fantasmé sur la ville et arpenté son bitume en compagnie des deux enquêteurs.

Deuxième ville visitée, New York. Je n'avais que l'embarras du choix pour la lecture. Je me suis arrêté sur le fameux bûcher des vanités de Tom Wolfe. Comme je ne l'ai toujours pas terminé ma critique viendra plus tard.

Troisième ville, Washington, la capitale des états unis. Troisième livre, Drama City de George Pelecanos. Le romancier s'est spécialisé dans la ville de Washington et y base tous ses livres. Alors que dans la plupart de la littérature Washington est le symbole du pouvoir, des manipulations de masses et des diverses théories du complots, George Pelecanos choisi d'aborder la ville sous l'angle du polar noir dans les bas quartiers.
Malheureusement, le roman ne va pas beaucoup plus loin qu'un simple polar, en fait à bien y réfléchir ce n'est même pas un polar. Il s'agit plutôt d'une tranche de vie de personnages dans les bas quartiers de Washington. Le personnage principal est attachant, c'est un ancien taulard qui tente de retrouver sa place dans la société avec un boulot dans une société protectrice des animaux. On le voit qui essaie de ne pas retomber dans la spirale de la drogue et de la violence. Ca se laisse lire, les personnages sont bien campé et réaliste, mais c'est loin d'être exceptionnel. L'écriture est quelconque. Un roman de gare, vite lu et encore plus vite oublié.




Je termine cette petite revue avec Cellulaire de Stephen King. Après avoir dévoré Ecriture, il me tardait de retrouver ce maître de la littérature populaire américaine. J'avais saisi le prétexte d'une intrigue se déroulant à Boston pour m'acheter le livre. Quelle déception ! Le roman est relativement épais avec près de six cent pages mais l'intrigue reste pitoyablement mince.
Les premières pages sont racoleuses et dramatiques avec la description de la fin du monde, rien de moins. Par une après midi ensoleillée, tous les téléphones portables du monde se mettent à carillonner à l'unisson. Malheur à celles et ceux qui décrochent, ils deviennent immédiatement fous furieux. Quelquefois suicidaires, la plupart du temps meurtriers mais toujours violents. Toute trace de civilisation dans le cerveau balayée par une rage primaire et une brutalité sanguinaire. Nous suivons alors les aventures d'un petit groupe de rescapés qui tentent de survivre dans la catastrophe. Peu à peu une conscience collective émerge des masses décérebrées et une nouvelle civilisation émerge. Un semblant d'organisation apparaît ainsi que des pouvoirs télépathiques grandissants chez les post-humains. Ces "siphonés" entament alors une guerre totale contre le restant de l'humanité.
Présenté comme cela, l'histoire est alléchante, le livre l'est malheureusement beaucoup moins.
Dans la forme déjà c'est catastrophique. C'est atrocement mal écrit ou bien mal traduit, probablement un peu des deux. Le style est pauvre et sans imagination. Seul avantage, ça se lit vite. Stephen King s'improvise pasteur de l'easy-reading en quelque sorte.
Passons au fond maintenant, ce n'est pas mieux. On sent rapidement que l'histoire ne suit pas un scénario réfléchi et que l'intrigue se forge au hasard des rencontres du petit groupe de survivants. Quand à la fin, elle est grand-guignolesque. Que le lecteur potentiel se rassure, l'humanité est sauvée in extremis.
Comme souvent avec Stephen King, la cause du glissement vers l'horreur n'est jamais expliquée, on se contente des hypothèses des protagonistes. Attentat terroriste ? Expérience qui a mal tournée ? Événement surnaturel ? On n'en saura pas plus et c'est diablement frustrant.
Enfin pas si frustrant que cela lorsque l'on suit les théories informatiques du romancier et son analogie avec la psyché humaine. Les explications sont au mieux erronées et les tentatives de vulgarisation par la bouche d'un gamin de huit ans font au choix sourire ou se lamenter l'homme de science.
Enfin bref, un roman à éviter. Je me demande si c'est une exception ou bien si tous les livres du quidam étaient déjà aussi mauvais lorsque je les dévorais à l'adolescence.

samedi, août 16, 2008

Sherlock Holmes ressuscité

Après une incursion dans le futur désenchanté de Cory Doctorow, je retourne à l'Angleterre Victorienne. Point d'attaque de train d'or ce coup-ci, mais encore une affaire criminelle à résoudre, du côté de la justice ce coup-ci.
Je retrouve le personnage mythique de Sherlock Holmes confronté à l'affaire du scrétaire italien. Il ne s'agit pas d'un roman perdu de Conan Doyle, mais d'une ouvre récente écrite par le talentueux Caleb Carr.
Cet auteur m'avait ébloui dans ses premiers romans, l'Aliéniste et l'Ange des ténèbres avec son personnage de Lazlo Kreizler. Singulier pionner de la psychologie qui démasquait les tueurs en série dans le New York de la fin du XIXeme siècle.
Alors la perspective de voir Caleb Carr reprendre l'illustre enquêteur consultant avait tout pour me réjouir. Et bien finalement non. Le livre n'est pas singulièrement mauvais, Sherlock Holmes reste fidèle à son intelligence et ses magistrales déductions. Mais on sent que le livre n'a pas la patine magnifiée par les années de la saga de Conan Doyle. C'est faiblard et ne supporte pas vraiment la comparaison.
L'enquête policière est plus classique, sauf que Sherlock Holmes se trouve dans le terrain dangereux des intrigues autour de la personnalité royale. Ca surprend pour un Sherlock Holmes, d'autant que la confrontation avec son frère Mycroft n'était pas vraiment indispensable. Autre chose, l'auteur se complaît à valoriser le personnage de Watson et d'insister sur son passé héroïque tandis que Watson dénigre son ami. L'effort est louable pour ce pauvre faire-valoir mais ça dénature l'oeuvre. L'intrigue est passablement intéressante par son lien avec l'histoire de la reine d'Ecosse Marie Stuart. Mais on ne retrouve pas les trésors de logique habituellement employé par Holmes. Au contraire, l'histoire se résous par à coup, arrivé à la moitié du livre, le lecteur connaît tous les tenants et aboutissants de l'affaire. Le reste est inutile voir ennuyeux.

En résumé, ça se laisse lire. Mais pour tous les fans de Sherlock Holmes, préférez l'original. Je vais de ce pas me relire le chien des Baskerville d'ailleurs.

vendredi, août 15, 2008

Magic Kindom, deux minutes d'arrêt

Fringale de lecture. Après la traversée du désert qu'a représenté pour moi la lecture des Bienveillantes, j'ai besoin de me changer les idées, de jouer au touriste spatial japonais. Tous le jours de découvre un autre univers et je m'extasie, mais je ne reste jamais longtemps en place, le temps de prendre quelques photos puis je repart.
Aujourd'hui, mon bus japonais c'est arrêté devant le manège enchanté de Disneyworld. On a visité la vision du futur que présente Cory Doctorow. Dans la dèche au Royaume Enchanté, tel est le titre du livre qui m'a occupé pendant quelques heures. Même pas deux jours, c'est dire si c'était un passage express.

Bon le livre n'est pas mauvais en soi, je l'ai lu d'une traite. Mais par contre j'ai redécouvert les aspects désagréable d'une science fiction à l'ancienne. Pourtant l'auteur est tout jeune et c'est son premier roman, mais il se croit obligé pour rendre crédible son univers d'y immerger le lecteur. En effet, le point de vue du protagoniste est ancré dans son monde. Nouveaux termes, nouveaux concepts, nouvelles technologies sont utilisés sans explications et ça pique un peu aux yeux pendant les cinquante premières pages.
Au cours du livre, le narrateur nous raconte petit à petit comment le monde que nous connaissons en est arrivé là. Et enfin le lecteur peut s'émerveiller devant le bon côté de la science fiction à l'ancienne. Ces romans ou l'on découvre une utopie sociale radicalement différente de notre mode de vie, où les fondements d'une société imaginaire servent à introduire une réflexion sur le réel.
En l'occurrence le contexte de l'histoire, c'est notre bonne vieille terre dans quelques années. Une société nommée Bitchun est devenue omnipotente grâce à la technologie qu'elle propose, à savoir l'immortalité, sympa non ?
Le fondement c'est d'être capable de sauvegarder l'être humain et de le ré-implanter dans un nouveau corps, à priori un clone. Et comme la mort n'existe plus, les gens peuvent explorer les possibilités d'avoir un corps plus jeune, plus vieux ou modifié génétiquement. Dans une telle société ou tout le monde peut vivre éternellement, ou le plus miséreux peut prétendre à la vie éternelle gratuite, ou la technologie se charge des tâches pénibles, le concept même d'argent a disparu. Remplacé par la notion de whuffie qui est la grosse invention de Cory Doctorow.
Ce terme regroupe les notions de reconnaissance, de réputation et de statut social. Ce sont des points que les personnes accumulent à mesure qu'il se font apprécier par leurs concitoyens. Et plus le score whuffie est important, plus le personnage peut prétendre à des biens et des services élevés. C'est un peu comme les discothèques branchées parisiennes le samedi soir, il vaux mieux être riche et célèbres pour pouvoir avoir le droit d'entrer.
Le principe est très intéressant et mieux que ça il devient crédible. Dans un tel monde ou l'on a plus besoin de travailler pour vivre décemment, les gens travaillent pour rendre service aux autres et ainsi augmenter leur score de whuffie et ainsi s'élever dans la société. Le jeu devient encore plus intéressant lorsque des groupes de personnes s'associent sous la forme d'adhocraties pour prendre le contrôle de structures pour le bien de tous et surtout pour augmenter leur réputation commune en rendant le monde "meilleur" ou plus intéressant.
Nous suivons ainsi les aventure d'un homme s'étant investi dans les attractions du Royaume Enchanté de DisneyWorld. Le narrateur, entrainé dans un sombre complot pour la conquête du parc va tout perdre, son accès au réseau omnipotent de la société bitchum, l'amour de sa vie et sa réputation.

Voilà ce que l'on peut raconter du roman sans trop déflorer l'intriques. Passé la complexité de l'immersion du début, ça se lit bien, c'est rafraîchissant et ça mène à de vraies réflexions. Alors quoi, c'est un bon livre ? En tout cas moi je n'ai pas trop accroché. Le livre est certes intéressant mais il y aurait eu je pense beaucoup mieux à faire.

dimanche, août 10, 2008

Un oiseau qui prend le train dans l'Angleterre victorienne

J'avais besoin de changer d'air après mes précédentes lectures sinistres et déprimantes. Je me suis donc assez naturellement vers la littérature de gare. Au sens littéral du terme, en effet j'ai tenté l'expérience de mettre en abyme en me rendant tous les jours au travail en feuilletant Un train d'or pour la Crimée de Michael Crichton. Certes les TER de banlieue transportent rarement une cargaison d'or et le romantisme de l'ère Victorienne manquait un peu à l'appel.
A travers ce livre, j'ai eu la joie de retrouver la littérature populaire et accessible des polars. Agréable et rapide à lire, ça occupe agréablement le temps perdu dans les transports en commun. De plus, j'ai eu la joie de retrouver la précision documentaire de Michael Crichton.

Il semblerait que le quidam soit parti des comptes rendus du procès, des extraits de journaux et des diverses dépositions de l'affaire pour écrire son roman. Il est vrai que ce cambriolage avait passionné l'opinion publique à l'époque et que la masse documentaire imposante offrait une base solide au livre.
En deux mots, le roman décrit les préparatifs, l'exécution et le procès de l'attaque en 1855 d'un train qui convoyait la paye des soldat en Crimée. Au détour des chapitres, Michael Crichton nous présente de manière pédagogique, presque professorale la vie dans l'Angleterre victorienne. Cela tient presque du roman historique.

Mais l'intérêt du livre ne vient pas de là. C'est surtout la description passionnante d'un casse. J'ai toujours adoré les films du genre, telle "L'arnaque", "La prisonnière espagnole", "L'affaire Thomas Crown", "Hudson Hawkes", "Ocean's Eleven" et tant d'autres. Ces films où par leur charisme, leur génie et leur débrouillardise les malfaiteurs organisent un cambriolage ou une arnaque spectaculaire sans recourir à la violence ou l'intimidation armée.

Et dans la mesure ou le roman est basé sur des faits historiques, on peut dire que l'organisateur du coup, Edward Pierce était un génie. Je n'ose en dire plus pour ne pas déflorer l'intrique aux lecteurs potentiels. Mais vous pouvez y aller les yeux fermé c'est du tout bon, pour de la littérature de gare du moins. En à peine trois jours j'avais terminé le livre et j'ai passé un sacré bon moment.

lundi, août 04, 2008

Un oiseau rattrapé par les Bienveillantes

Qu'ai je donc fait pour mériter un tel châtiment. Il semblerait que les furies grecques, ou autrement dit les Bienveillantes aient décidé de me jouer un sale tour. En effet, lire ou subir l'ouvrage éponyme de Jonathan Litell tient de la punition divine.

Imaginez vous ça, un livre tellement dense que l'on pourrait le recycler en briques pour construire une maison. Près de mille cinq cents pages d'un texte, lourd ou l'auteur ne nous épargne aucune récréation. Le retour à la ligne est rare pour ne pas dire inespéré, y compris durant les dialogues ce qui donne aux pages un aspect chargé et monotone. L'écriture est petite, je pense que quiconque achèterais ses livres au nombre de caractères serait gagnant, quand à les lire toutes ces phrases c'est autre chose. Ainsi, l'auteur ne se donne pas la peine de traduire de nombreuses expressions ou termes allemande, on trouve même des citations grecques ou latines. Ainsi, l'action se déroulant pendant la guerre en allemagne, on a systématiquement droit à la désignation des grades dans leur langue d'origine. C'est vrai, parler d'un major, d'un colonel ou d'un simple officier eut été trop simple, on perd le charme d'un Obersturmbannführer ou d'un Hauptfelwebel. Ce livre m'a immédiatement rappelé le profond dégoût que j'ai pour les langues germaniques (alors que j'ai eu le malheur de les pratiquer pendant plusieurs années).

Mais somme toute, ce n'est pas le plus la forme qui m'a choqué dans ce livre. C'est le fond qui est véritablement répugnant.
Donc nous suivons pendant ces quelques milles cinq cent pages (ce qui a représenté près d'un mois de lecture pour moi) les aventure d'un jeune officier SS durant la seconde guerre mondiale. Et pas un gentil SS, mais l'un de ceux qui ont activement participé à l'extermination des juifs. Ainsi on le suit au début du livre qui suit le front de l'est pour massacrer les partisan communistes, les malades mentaux et surtout les juifs par milliers. Puis on le regarde abandonner ses derniers restes de raison en organisant le travail dans les camps de concentration polonais.
Pour être exact, le roman retrace avec plus ou moins de talent quatre intrigue distinctes, la vie au jour le jour de notre protagoniste et sa progression dans l'échelle sociale militaire, la progression et l'origine de son déséquilibre mental causé par un amour exclusif et incestueux pour sa soeur, une sombre affaire criminelle lié à un passage en France où le narrateur retrouve ses parents et bien sûr la quatrième histoire est celle qui s'affuble d'un grand H comme pour revendiquer ses atrocités.

Notre héro est tout sauf sympathique. Ce n'est pas vraiment un boucher, mais il perçoit la Shoah comme une nécessité et s'acquitte de ses ordres avec une froideur inquiétante. Seul son organisme le trahit parfois par des troubles gastriques. Il apparaît régulièrement comme un pleurnichard qui s'apitoie sur son sort et son amour perdu pour sa soeur en se réfugiant derrière une sexualité soumise et sans amour pour les hommes qui frôle dangereusement à la pédérastie. Ses névroses le rattrapent peu à peu et il s'enferme dans des rêveries absurdes, fantasmagoriques et quasiment impossible à suivre, il projette sa philosophie fétide dans des tirades à la limite du supportable. C'est à peine si le dernier tiers du livre est lisible. Et son comportement à la fin devient proprement irrationnel et grotesque.

Donc ce livre est long, difficile à lire et très dur. Même si un éclat admirable de travail transparaît pour restituer l'horreur de cette période je regrette un peu mon achat. Sans compter que cela commence à faire beaucoup de livre que je lit qui ressasse le sort des juifs entre un secret, le complot contre l'Amérique et celui là, la coupe est pleine.

samedi, juillet 26, 2008

Certains secrets ne devraient pas être dévoilés...

Encore une petite bafouille pour ne pas m'attarder sur Un secret qui ne vaut pas d'être dévoilé. En effet le roman éponyme de Philippe Grimbert avait adapté au cinéma l'an dernier et j'avais regretté de le manquer.
Imaginez vous ça le pitch de ce film, un homme qui découvre à l'âge adulte que le frère imaginaire qu'il s'était inventé pour combler sa lolitude enfantine existe pour de vrai. Ca stimule les papilles romanesque ça. Alors lorsque j'ai aperçu la couverture du livre, forcément j'ai investi.

Alors que ma lecture marathon des Bienveillantes de Jonathan Litell était interrompue par la perte inopinée du roman. Oui j'aime bien égarer mes affaires, c'est l'un de mes sports favori pour découvrir plus tard que je les avait sous les yeux. Enfin bref, j'avais décidé de faire une pause dans les atrocités nazies avec le livre de Philippe Grimbert.
Première déception, je retrouvais mes atrocités de la deuxième guerre mondiales par les phantasmes d'un petit garçon dans l'après guerre. De l'autre côté, dans les communautés juives parisiennes. Et quand je parle de phantasme, j'ai résumé l'intégralité du bouquin. Au début le narrateur nous présente son frère imaginaire, ensuite il décrit la rencontre idéale de ses parents pendant la guerre. Troisième et dernière partie du livre, il déterre le fameux secret et nous présente un autre phantasme à peine plus proche de la réalité.
En fait, sans dévoiler trop l'intrigue à peine plus épaisse que du papier à cigarette, le fond de l'histoire se limite à une histoire de séduction d'une banalité affligeante. Du genre je me marie avec machine mais en fait je tombe amoureux d'une autre. Oups, ça y est j'ai résumé le livre, désolé.

L'écriture est riche à en devenir bien souvent indigeste, mais heureusement les deux cents pages se finissent très vite, à peine deux trajets pour aller travailler en ce qui me concerne. C'était un de ces roman de gare tout juste bon à intéresser les âmes simples attirées par la psychologie de comptoir et les drames sentimentaux.
Je retourne à mes détestables nasillons des Bienveillantes.

Un oiseau déçu...

lundi, juin 16, 2008

Sex, Drugs and a Songbird in Frisco

La météo n'a pas changé depuis mes dernières lectures et la pluie continue d'arroser copieusement le pays. Alors pour trouver un peu de soleil au dessus des voiles monotones de stratus, j'ai commencé les Chroniques de San Francisco de Armistead Maupin. L'action se passe à Frisco durant la fin des seventies. Alors que les hippies s'embourgeoisent peu à peu, San Francisco garde cette étincelle d'espoir et de liberté unique au monde. Ce livre annonce un cocktail détonant de "Sex, drug and rock 'n roll" passé au shaker avec une bonne dose de "Sea, sex 'n sun". Et si le rock est un peu absent, que la mer reste froide et les drogues plutôt douces, le livre tient ses promesses.


Le roman est servi par une écriture riche et nerveuse. Le style est léger sans jamais devenir simpliste. L'histoire se découvre surtout dans les dialogues vigoureux entre les personnages qui en deviennent parfois délicats à suivre. A travers cette histoire, j'ai l'impression qu'Armistead Maupin a inventé la télé-réalité bien avant l'heure. Entre les histoires de culs d'un soir, les tromperies et les mensonges, les quiproquos et les malentendus le texte est particulièrement croustillant. C'est un peu comme si un de ces magazines voyeuristes sur la vie caché des star racontait la vie quotidienne d'une bande de jeunes qui cherchent à s'éclater avant de mourir. Du coup ça se lit vite, très vite. J'ai du finir ce premier tome en moins d'une semaine. Mais au final on en ressort sans avoir tiré grand chose. Pas de profond enseignement philosophique qui nous amène à réfléchir sur le sens de la vie. Même au niveau de l'intrique, c'est très pauvre. La seule énigme présentée au début du livre sur le passé sulfureux de la logeuse de l'héroïne n'est jamais expliqué dans le premier tome. C'est peut être pour inciter à acheter la suite, mais j'avoue que j'ai d'autres chats à fouetter.


Dans cette histoire on suit les vies d'une certaine Mary Ann et des personnes qui croisent sa vie. Que ce soit les locataires de l'immeuble tenu par la mystérieuse logeuse, leurs amis, amants ou collègues. Après la naïve Mary Ann séduite par la ville qui décide de s'y installer, la logeuse libertaire qui scotche un joint sur la porte de ses nouveaux locataires pour célébrer leur arrivée, les autres portraits sont tous aussi riches en couleurs et vivants. On s'attache aux protagonistes de l'histoire alors qu'on dévore leur vie de papier. On ressort du train le sourire au lèvres pour affronter la pluie qui c'est remise à tomber. Finalement, c'est bien suffisant :


Un oiseau hippie

jeudi, juin 05, 2008

Lindbergh survole le mois de mai avec son complot contre l'Amérique

On le qualifie de joli ce mois de mai, les fleurs qui s'épanouissent, les jours qui rallongent et le soleil printanier qui sème la joie sur nos visages. La joie du mâle qui se régale des jupes courtes qui fleurissent sur les trottoirs, la joie de la femelle qui peut épuiser les défenses naturelles de sa peau en l'exposant aux ultraviolets.
Cette année point de mini jupes ou de bronzage à croquer. Le joli moi de mai a ramené sa suite grisaillante de nuages sombres, d'orages et de pluies impromptues pour calmer les ardeurs incendiaires des premiers barbecues dominicaux.
Du coup, moi qui me régalait d'une accalmie professionnelle pour retourner caresser les nuages sous ma bâches multicolore ben je suis resté au travail et j'ai pu profiter des longues pauses ferroviaires pour lire un peu.

Mon compagnon des transports ce mois ci s'appelle Le Complot contre l'Amérique de Philip Roth. Je viens de le terminer ce matin, et alors que je m'apprête à en faire une petite critique, je m'aperçois que je n'ai pas grand chose à en dire, ni en bien ni en mal. Quel ennui à la mesure de la météo extérieure.
Non que l'on s'ennuie particulièrement en lisant ce livre, juste qu'au final on en retire pas grand chose. Si ce n'est c'est ce sentiment diffus d'avoir été floué, trahi par l'auteur qui nous promet une autobiographie de sa petite enfance. En effet, l'autobiographie n'est qu'un prétexte pour mettre en place une uchronie magistrale sur les années 40 dans les états unis d'Amérique. On y découvre le destin des juifs d'Amérique dans l'enfer d'une victoire présidentielle du célèbre aviateur Charles Lindbergh vainqueur de la première traversée de l'atlantique en solitaire. L'aigle solitaire n'est en fait qu'un antisémite virulent et isolationniste, ce qui au passage après quelques vérifications est absolument vrai. Il remporte donc les élection de 1940 face à Roosevelt sur la promesse de tenir les Etats Unis à l'écart du conflit sanglant européen. Sitôt élu, il tient sa promesse en signant des pactes de non agression avec Hitler et l'empereur Japonais. Mais cette paix relative se fera au prix d'une terrible trahison envers les communautés juives.
Fort heureusement (ou pas) le livre n'est pas trop contaminé par cette noirceur, il expose les jeunes années de l'auteur, gamin juif dans ce contexte difficile. Mis à part à la toute fin du livre, les juifs ne font gère l'objet des atrocités qui sévissent en Europe. Point de pogrom en vue au pays de l'oncle Sam, juste une banalisation de l'antisémitisme et une réduction progressives des droits de l'homme, enfin surtout des droits des enfants d'Israél.
La famille de l'auteur fait face aux évènements dans une révolte tranquille et continue de vivre sa vie alors que l'étau se resserre autour de leur libertés. Une des choses qui m'a marqué, c'est l'intelligence et le recul impossible du narrateur. On veut bien que le gamin soit doué et que la guerre fasse grandir plus vite, mais l'auteur fait preuve d'une sagesse qu'on ne rencontre même pas chez la plupart des adultes.
J'imagine que de l'autobiographie, Philip Roth à tiré suffisamment d'éléments pour donner un ton vrai à son histoire. Il a entremêlé une réalité documentée et une analyse redoutable de son époque,
à des hypothèses probables sur le comportement des personnages publics impliqués tout en dissimulant les ingrédients piquants de la pure fiction. A tel point que j'en ai douté de mes maigres connaissances de l'histoire américaine et que j'ai vérifié, deux fois (plus une troisième dans les annexes du livre) que non, Lindbergh n'avait jamais été président des états unis.

Au final, c'est je pense un bon roman, bien écrit mais sans être exceptionnel. L'uchronie qu'on nous présente est crédible. La psychologie des personnages est riche et complexe. On en découvre beaucoup sur la vie et l'histoire des états unis d'Amérique et la vie dans les années 40 et aussi sur la condition juive.
Mais bon, voilà, je n'ai pas plus accroché que cela. C'est long, ça manque parfois de rythme, ça ne prend que rarement aux tripes, les références historiques des faits et gestes des personnages de l'époque me sont trop inconnus pour démêler le vrai du faux. Fort heureusement, Philip Roth nous livre ses sources en annexe , il nous brosse la vie réelle des personnages existants et nous dépeins un autre visage de Charles Lindbergh au travers de ses discours dans America First (groupuscule antisémite et isolationniste ayant eu quelque succès au début des années 40).

Hop, voilà que je laisse la sérieuse Côte Est des années 40 pour traverser l'Amérique en attaquant les années 70 sur la Côte Ouest avec les Chroniques de San Fransisco d'Amistead Maupin. Changement radical d'univers. J'espère que maintenant que mai est parti, le soleil pourra revenir.

Un oiseau sous la pluie.

jeudi, mai 29, 2008

Un oiseau dans le miroir

La vérité est parfois triste à entendre. Il faut se résoudre à l'évidence, seul et sans armes. J'ai dépassé la trentaine et le destin d'Alexandre ne m'est pas promis. Je ne suis ni mort, ni célèbre, c'est à peine si une modeste centaine de personnes ont entendu parler de moi.

Il est donc emminement probable que personne ne ce soit donné la peine d'écrire ma biographie. Il faut dire, que le lecteur potentiel n'y trouverait qu'ennui et bâillements. Et pourtant, dans le cadre d'un appel à texte, j'en ai besoin. Soit ! On est finalement jamais mieux servi que par soi même. Alors pour remplumer mon petit ego maladif, je vais m'y mettre. Et comme l'exercice de style qui m'est demandé est relatif à l'écriture, je vais l'orienter dans ce sens.


Il semblerait que trente et une bougies, cela ne soit pas suffisant pour attraper dans les filets de la morne réalité le sourire d'un gamin rêveur. Ma vie jusqu'ici a suivi les courants soufflés par l'opportunité et le besoin si tant est qu'elle ne présente à première vue que peu d'intérêt. Sauf que je suis un super héros. Bon, je sais bien que le manuel des super héros nous apprend dès la première page qu'il ne faut surtout pas révéler notre double vie. Mais tant que nous sommes entre nous, je suppose que je peux faire une incartade au règlement.

Le jour, je sers la science et c'est ma joie. Enfin tant que mon employeur en reste persuadé ça m'arrange. Parce que pour tout vous dire, je perçois plus mon travail comme alimentaire. Il ne s'agit pas de jouer à l'alchimiste en versant des substances colorées pour faire réagir des éprouvettes obscures ni même d'arborer la blouse du savant fou pour changer le monde avec des inventions géniales. Non, ma science sans conscience s'occupe plutôt de caresser des rongeurs en plastique et de psalmodier des incantations sur la surface vitrée d'une boite rétro éclairée par des milliers d'électrons. Enfin bref, si mon titre honorifique de docteur me donne l'illusion de la gloire, force m'est de constater que mes collègues n'en tiennent pas compte. Et que ma vie au sein de cette grande entreprise de télécommunication colorée semble bien terne.

La nuit, je laisse tomber le masque du scientifique froid et sérieux pour revêtir mon collant multicolore et ma cape de super héros de l'imaginaire. J'ai longtemps sauvé le monde dans des univers pixellisés ou bien en lançant des dés aux dimensions non euclidiennes pour tracer ma route au milieu des donjons et des dragons. J'ai beaucoup trop lu pour rester sain d'esprit. Voici qu'aujourd'hui, je caresse l'espoir de faire chanter la plume. Après tout l'écriture offre une commodité remarquable, c'est beaucoup plus facile de sauver le monde quand c'est vous qui l'avez créé.

D'où ma modeste contribution du jour.

jeudi, mai 15, 2008

Une traversée de l'été en quelques lignes chrono !

Un oiseau de passage express pour commenter La traversée de l'été de Truman Capote. Acheté à la va vite dans le rayon littérature anorexique d'un supermarché de seconde zone, vite lu et certainement vite oublié.

Ca faisait longtemps que je voulais lire cet auteur et lorsque j'ai trouvé un petit opus de 150 pages, je me suis empressé de le prendre. Il m'aura duré deux jours, pressé que j'étais de m'en débarrasser.

Il faut dire que le thème central frise déjà le cliché , les amours contrariées et banales d'une riche héritière et d'un modeste employé de parking durant un été caniculaire dans le New York du début des années 40. Il ne se passe rien de bien palpitant, et de grande ellipses rendent le suivi de l'intrique chaotique.

Certes, ici où là traînent des métaphores ou des images évocatrice, certes le style est parfois admirable. Mais bon c'est bien peu.

La seule chose intéressante de se livre c'est son histoire, comment il avait été refusé par l'éditeur il y a bien longtemps et retrouvé par hasard il y a tout juste quelques années lors d'une vente aux enchères.

Après réflexion, je n'ai rien d'autre à en dire. Il faudra que je me fasse un avis sur le célébrissime Truman Capote avec autre chose et ne pas le juger à ce seul roman de jeunesse assez quelconque.


Un oiseau déjà reparti


mardi, mai 13, 2008

Harry et Millénium au pays des meilleurs vendeurs...

La sagesse populaire vante les mérites des petits ruisseaux qui forment les grandes rivières. Mais j'ai peur qu'avec cette modeste revue de lecture, le filet de ma voix se dilue complètement dans le fleuve des critiques littéraires. Car tout a été dit ou presque je pense sur les deux livres que je m'apprête à commenter. Quelques heures à peine après leurs mise en vente, c'était déjà des best-sellers.

Mais bon pour m'appuyer sur la béquille de la mémoire qu'est ce petit journal, je vais quand même présenter mon avis.


Harry Potter et les reliques de la mort, tel est le titre du dernier livre de J. K. Rowling, dernier opus des aventures du collégien le plus célèbre au monde. J'avoue que si les sirènes publicitaires ne m'ont pas attrapées dans leurs filets, plus d'un an après la parution du livre, j'ai commencé la lecture avec une certaine impatience, et de grandes espérances.

Cette saga m'avait vraiment parue enfantine et caricaturale à l'extrême au début, ne méritant pas du tout l'immense succès qu'elle avait obtenue. Petit à petit, malgré son côté manichéen et simpliste, je m'était attaché à cet univers qui, au fur et à mesure des romans devenait plus sombre, plus mature. La promesse d'une lecture qui grandissait avec ses lecteurs semblait tenue.

Que d'attente donc pour la conclusion d'une telle oeuvre. Le grand méchant définitivement de retour, les prémisses d'une gigantesque guerre, la disparition de l'un des personnages principaux. Et pour faire court, ces ambitions définitivement clouées au pilori de la médiocrité commerciale. J'ai plus l'impression que l'auteur a rédigé son livre sous la pression publique et commerciale que sous l'emprise d'une quelconque inspiration. Les muses devaient être en grève.

Le rythme tout d'abord, il est définitivement raté, oscillant entre de grandes périodes ou il ne se passe rien et des catastrophes impromptues résolues à la va vite. Si c'est pour faire monter l'angoisse, bof. Supporter 200 pages d'adolescents qui font du camping n'a rien de bien excitant.

L'intrigue ensuite, elle est plate. L'objectif des protagonistes étant de trouver une collection d'objets magiques les horcruxes. A cette première quête, digne d'un mauvais jeu vidéo des années 80 se greffe de manière absurde la quête secondaire des fameuses reliques de la mort. D'autres objets magiques qui au final n'ont qu'un rôle minimal et une inutilité absolue. Chaque objet constitue une énigme à résoudre. Une énigme inintéressante et résolue par une succession d'intervention quasi divine. D'ailleurs lorsque les personnages sont en danger, ils sont également sauvés par un malheureux deus ex machina.

Pendant ce temps là, tandis que les personnages principaux jouent aux joyeux campeurs, le reste du monde s'enfonce dans l'horreur. Les sombres magiciens alliés du seigneur des ténèbres ont les moyens de dominer le monde des simples mortels et la situation des moldus ou des magiciens de sang mêlé ressemble singulièrement à celle des juifs lors du début de la deuxième guerre mondiale. C'est un autre problème du livre, l'ambiance. On s'ennuie germe, le côté Disney de le romancière l'empêche de distiller correctement la noirceur de la situation. Quelle dommage avec cette toile de fond dramatique. Pendant ce temps là, le grand méchant joue au globe trotter. C'est une menace tellement lointaine que le lecteur s'en désintéresse totalement. Même lorsque les amis des héros sont touchés, le lecteur ne parvient pas à s'en émouvoir.

Enfin bref, pour ne pas dévoiler la fin du livre, je n'en dirais pas plus. Tout est que le final est loin d'être à la hauteur des dix ans qu'il aura fallu pour l'écrire.

Pour ne pas trop noircir le tableau, je me contenterais de finir sur une note positive. Au travers de cette saga, Harry Potter m'a convaincu d'une chose, la magie existe. Il suffit d'y croire pour que le temps d'une lecture on se retrouve projeté dans un monde imaginaire créé par les sortilèges de quelques grammes d'encre.


Je ne m'étendrais pas trop sur le deuxième livre, car c'est le premier tome d'une trilogie dont je ne lirait certainement jamais la suite. Il s'agit de Millenium de Stieg Larsson. Une série suédoise qui aura fait couler beaucoup d'encre. J'ai donc lu le premier tome Les hommes qui n'aimaient pas les femmes, quelle déception.

C'est vrai que c'est un bon polar avec une chouette intrigue, même si celle-ci met du temps à s'installer. Un excentrique milliardaire qui embauche un journaliste économique en disgrâce pour enquêter sur une disparition mystérieuse survenue quarante ans plus tôt. Une étrange jeune femme au passé obscur viendra l'assister dans son travail d'investigation sur l'une des plus puissantes familles industrielle de suède.

Les personnages, sans être exceptionnels sont intéressants et détaillés. Le contexte est crédible enfin bref, tout pour faire une bonne histoire.

Mais voilà tout le problème, c'est affreusement mal écrit et probablement mal traduit. Par exemple la familiarité dans les discours est désagréable. Effet de la traduction ou bien différence avec la culture suédoise ? L'auteur ne sait pas décrire un paysage ou une situation, il ne sait que présenter l'action. Il n'y a aucun effort dans l'écriture, aucune preuve de style. Enfin bref ce livre ne me fait pas rêver, ne titille pas mon imaginaire.

Ce se lit très bien, ça captive l'intérêt du lecture mais ce n'est au final qu'un roman de gare qui est bien loin de mériter son succès.


Voilà tout pour aujourd'hui.


Un oiseau effaré devant les goûts étranges des masses consuméristes





jeudi, avril 10, 2008

Découverte d'un étrange objet littéraire non identifié...

Les extraterrestres existent. C'est comme à mon habitude lors d'une après midi pluvieuse, flânant entre les étagères débordant de mots figés sur le papier, à la recherche d'un raccourci vers l'imaginaire, que je l'ai rencontré.

Il était là, dominant fièrement les autres livres sur le rayonnage avec sa tranche noire et sa couverture intrigante et fractale d'Eric Scala. La Maison des feuilles de Mark Z. Danielewski, tel était le titre du livre. J'en avais bien sûr entendu parler sur internet.

Un objet étrange, un véritable roman interactif, une énigme pour le lecteur attiré comme le papillon par la bougie. La flamme m'a bien sûr brûlé et c'est en faisant chauffer la carte bleue que je repartis de la librairie l'ouvrage sous le bras.

Le début de ma lecture fût un émerveillement. Un emboîtement infini des poupées russes par les mises en abîme successives donne le vertige. Il est impossible de raconter l'histoire en deux mots, mais je tient quand même à essayer. Le roman nous raconte donc l'histoire d'un livre, La Maison des feuilles écrit par un mystérieux vieux bonhomme , un ouvrage qui se pose un essai critique d'un film, le Navidson Record, mi documentaire tourné par un photographe talentueux. Ce photographe nous présente sa maison dans laquelle il vient d'emménager et qui très rapidement se révèle étrange. Avec de nouvelles pièces et des couloirs qui apparaissent et qui défient les lois de la physique. La maison qui s'ouvre vers un univers radicalement ténébreux, succession de couloirs et de salles sombres, sinistres et vides dont la géométrie change perpétuellement et dont les dimensions sont infinies. Si le livre s'attarde souvent sur les détails de couleurs, de texture et de mise en lumière du fil, c'est pour le moins paradoxal étant donné que l'auteur fictif est aveugle.

L'histoire commence alors qu'un protagoniste, Johnny découvre ce livre à la mort (suspecte) du vieil écrivain et décide de le lire, puis happé par ses mystères, entreprends de l'annoter. On trouve donc entremêlées dans le livres ses notes personnelles qui relatent sa vie et la manière dont le livre s'empare de lui et lui fait découvrir le monde d'un oeil nouveau. Très rapidement, le passé du jeune homme se révèle également trouble et la folie le rattrape.

Et les mises en abîme ne s'arrêtent pas là, bien au contraire! Mais je ne peut révéler ici les autres éléments car ils pourraient gâcher la découverte du lecteur potentiel.


Ce qui est admirable et vraiment inhabituel, c'est qu'outre le fond, l'auteur (le vrai Mark Z. Danielewski) joue avec la forme. Outre le texte de l'auteur imaginaire, on trouve de fréquentes notes bibliographiques plus ou moins réelles ou pertinentes, les notes en bas de page de Johnny qui constituent parfois des chapitres entiers ou encore des remarques étranges de la part des mystérieux éditeurs. La mise en page est parfois fantasque, des passages sont barrés, des passages sont vides, le mot Maison est systématiquement coloré même lorsqu'il apparaît dans d'autres langues, des expressions sont soulignées ou italiques. Même dans la page, l'ordonnancement des mots devient vite facétieux, certains passages sont à lire dans un miroir, d'autres imposent fréquemment de retourner le livre dans tous les sens, certaines pages ne contiennent que quelques caractères alors que d'autres sont couvertes d'un texte qui dessine des motifs en ombres chinoises.

A vrai dire, je me suis même parfois demandé s'il ne fallait pas regarder certaines pages vides sous la flamme d'un briquet, des fois qu'ils ne dissimulent pas de l'encre sympathique.

Enfin bon, je pourrait passe des heures à énumérer toutes les bizarreries de ce livre.


A mesure que l'ont s'approche de la fin le texte devient de plus en plus difficile à comprendre et pénible. Des énigmes saupoudrent les dernières pages, comme dans cet endroit il il faut prendre la première lettre de chaque mot pour reconstituer le message, ou bien extraire du sens dans la disposition incongrue des majuscules.


C'est comme ça que j'ai terminé le livre, sur un sentiment désagréable et frustrant d'être passé à côté de la vérité, de ne pas avoir compris. Toutes ces choses restent qui sans réponses et finalement. Il faudra peut être que je le relise, mais pour l'heure je n'en ai pas le courage.


Mais il me reste quand même la sensation d'avoir vécu une expérience incomparable, d'avoir rencontré les extraterrestres tranquillement à bouquiner dans mon train. Quelle extase que ce roman d'horreur expérimental. Accrochez-vous, la Maison des feuilles n'attend plus que vous.


Un oiseau noyé sous les feuilles

dimanche, mars 23, 2008

Des trains et des pages...

Encore une petite revue de lecture, motivée par mon temps passé dans les transports. Il faut dire que ma conscience écologique secondée par des préoccupations bassement financières m'ont fait préférer le train à la voiture. Comme le trajet pour me rendre au travail et en revenir me prend plus de deux heures tous les jours, j'ai largement le temps d'assouvir ma soif de lecture.

Mon premier compagnon de train, ce fût un livre acheté au hasard de mes pérégrinations consommatrice dans ces temples de la culture des masses, sous le soleil des néons déprimants. L'ouvrage s'appelle l'Ombre du vent et son auteur espagnol, un certain Carlos Ruiz Zafón m'était jusqu'alors inconnu.
Dans ce livre, c'est la couverture en tête de gondole qui a tout d'abord attiré mon regard. Une magnifique photo en sépia au grain prononcé qui représente un homme et un jeune garçon qui s'avancent le long d'une avenue déserte. Attiré comme un papillon par la lumière, je regarde la quatrième de couverture et me voilà conquis. On nous présente l'histoire d'un petit garçon qui découvre un lieu mystérieux, le Cimetière des Livres Oubliés. Dans cette bibliothèque des livres à l'index, il y découvre et adopte un ouvrage, l'Ombre du vent. Et toute sa vie se verra chamboulée par cette lecture.
J'ai véritablement été subjugué par ce livre qui nous raconte le passage de l'enfant vers la vie d'adulte et ses aventures dans le Barcelone d'après guerre. Une histoire captivante autour du personnage mystérieux de Julian Carax, l'auteur de l'Ombre du vent dont le narrateur essaye de comprendre le destin et les secrets. L'écriture est admirable, simple et élégante, innovante et efficace. Dans ce livre on parle beaucoup de littérature ce qui m'attire toujours, mais on retrouve aussi le suspense d'un bon polar. Même le côté romantique m'a séduit, les passions se nouent, les coeurs se brisent tandis que le danger guette à chaque instant.
Après mes précédentes lectures médiocres ou tout juste passables, j'ai découvert ce livre par hasard. Sans être une révélation, c'est un véritable bijou. D'ailleurs je le conseille chaudement.

Ce n'est pas le cas du deuxième livre dont je vais parler. Cela fait bien longtemps que je cherchais à lire le cycle de La roue du temps de Robert Jordan. Je la cherchais sans grande conviction il faut le reconnaître, mais j'ai finit par le trouver. J'ai donc acheté le premier tome et je l'ai lu, quelle déception.
Je ne m'explique vraiment pas le succès qu'a pu avoir l'auteur. Tout d'abord c'est très mal écrit ou bien mal traduit, certainement un mélange des deux. Les quelques fulgurances de style sont prétentieuses et incongrues au milieu de la fange littéraire. Mais plus grave encore que d'être mal écrit, le principal défaut de ce livre est de ne pas savoir raconter une histoire.
Ou plus exactement de ne pas être capable d'inventer une histoire nouvelle. J'ai eu en le lisant la désagréable impression de retrouver uns seigneur des anneaux plagié par un tâcheron médiocre.
Dans cette histoire on retrouve tous les poncifs de la littérature fantastique. Le démarrage sur les chapeaux de roues par un danger tout autant mortel qu'imprévu qui s'abat pile poil sur la tête de nos futurs héros. Parlons en de ces 'héros', comme d'habitude ce sont des jeunes gens au sortir de l'adolescence, chapeautés par des personnages hauts en couleurs. Le tout forme l'équipe habituelle ou tout le monde est exceptionnel et complémentaire. On dirait une équipe de de jeux de rôle, hop un guerrier, une magicienne, un troubadour aux talents de voleur, une prêtresse et nos fameux gamins. Ces gamins touchés par une prophétie qui annonce la fin du monde. Bien entendu, la prophétie raconte aussi des histoires de héros à venir aux pouvoirs extraordinaires qui sont le seul rempart contre les ténèbres. Le voyage qu'accompliront ces enfants au bout du monde sera leur rite de passage vers l'âge adulte, vous l'avez bien deviné, ce sont effectivement les gamins qui doivent sauver le monde. Là dedans, on retrouve les habituelles auberges avec leurs taverniers bonhomme et courageux, les traîtres et leurs trahisons dramatiques, et enfin les armées du mal qui traquent notre équipe. Encore quelques poignées de lieux de légendes, de séparation dramatique du groupe et quelques inspirations mythologie et voilà. Vous avez la Roue du temps de Robert Jordan.
Heureusement que de tels livrent existent, ils ont au moins le mérite de donner du contraste et de faire briller la bonne littérature.

D'ailleurs j'y arrive. Comme je garde le meilleur pour la fin, je vais maintenant vous parler de L'élégance du Hérisson de Muriel Barbery. Encore un achat fait au hasard, décidément le hasard a bien fait les choses avec cette sélection.
Ce genre d'ouvrage me fait d'habitude fuir. Vous savez ce dont je veux parler. Mais si, à partir de la rentrée c'est toujours le même cirque. Renaudot, Goncourt et autres Fémina qui paradent. On les reconnaît facilement dans les librairies. Tout d'abord car comme ils ont été couronnés, ils trônent véritablement sur le devant de la scène. L'uniformité de toutes ces couvertures beiges ou blanches d'une rare sobriété brisée invariablement par une banderole rouge pour annoncer triomphalement le nom du prix que le livre arbore.
Contrairement à mon habitude, j'ai donc acheté l'un de ces ouvrages, l'élégance du Hérisson, prix des libraires 2007.
Et je n'ai vraiment pas été déçu. Le thème de l'histoire pourrait paraître banal à première vue. Les destins croisés d'une concierge et d'une jeune adolescente, fille de bonne famille qui habitent le même immeuble. Mais ça devient intéressant à partir du moment ou l'on réalise que ladite concierge est dotée d'une érudition rare et se cache pour assouvir sa soif de culture. Tandis que la fillette est une surdouée qui face à la vacuité du monde dans lequel elle doit grandir prend la décision de se suicider le jour de ses treize ans.
Ca parle de littérature, de culture en général et présente d'intéressantes réflexions sur la philosophie la société ou la beauté.
Ce livre était un régal, agréable à lire, qui amène à réfléchir sur le monde. L'un de ses bouquins dont on sort grandi.

vendredi, mars 07, 2008

Un oiseau Grenoblois...

On la surnomme la capitale des Alpes. C'est vrai que pour la France il n'y a guère qu'Annecy qui pourrait rivaliser à ce titre. Si la ville est très agréable à vivre et économiquement très active, elle est surtout merveilleuse pour stimuler l'imaginaire. Voici donc mon petit carnet de notes au cas où j'écririais un jour une histoire basée à Grenoble.

Derrière la carte postale fameuse qui présente le téléphérique avec ses petites cabines rondes, les oeufs comme les surnomment les Grenoblois, aux abords de l'isère qui s'écoule indolente, sous la vieille cathédrale notre dame et dans les montagnes enneigées bien des secrets, des passions et des conflits couvent.

Tout d'abord il y a les gens. Après avoir vécu une grande partie de ma vie en région parisienne ou à proximité des grands centres universitaires, c'est à Grenoble que j'ai découvert le sens du mot cosmopolite. Dans cette ville on croise les ethnies, les peuples et les communautés les plus diverses. Un détour dans n'importe quelle grande surface permet de s'en rendre compte. Je ne pourrais jamais terminer une liste de toutes les nationalités que j'ai pu apprendre à connaître en quelques années. On peut cependant remarquer que l'une des communautés les plus importantes est celles des Italiens et des Siciliens, mais j'y reviendrais plus tard. Malgré une certaine froideur au premier abord et la haine ordinaire pour tous ces 'étrangers', les pauvres du sud de la ville qui viennent piquer le travail aux braves Français, mais aussi les riches dans la vallée du Grésivaudan qui font monter les prix. La plus large part de la population est jeune et ouverte d'esprit. A bien y réfléchir les purs Grenoblois installés dans la région depuis plus de deux générations que je connais se comptent sur les doigts d'une main. Grenoble, une ville de passage et de mélange par excellence.

Géographiquement, la ville se compose comme cela.
Au nord on trouve les quais de l'Isère, une bande étroite de terre entre l'eau et la montagne surplombée par la forteresse de la Bastille. Cette zone interpelle le visiteur de passage car le long de la petite route, les pizzerias sont accolées les unes aux autres. Je ne les ai jamais comptées mais on dépasse facilement la dizaine, amassées au même endroit. Elles sont pour la plupart ouvertes tous les soirs, mais la cuisine est médiocre. Apparemment il existe d'autres raisons qui justifient leur présence, de là à envisager un scénario maffieux de blanchiment d'argent il n'y a qu'un pas, facile à franchir. Surtout qu'une dizaine d'années plus tôt, la ville était tristement célèbre pour ses règlements de compte en pleine rue. Une copine a même assisté à une fusillade juste sous ses fenêtres.
Comme je l'ai déjà dit, il y avait beaucoup d'Italiens en ville. Je me souviens notamment d'une soirée très sympathique au milieu d'une assemblée de Siciliens, entre les guitares, les chants et les éclats de voix, je me serais cru dans un film. On célébrait les trente ans d'une amie et les moeurs de la famille traditionaliste et religieuse m'ont impressionné. La fille en question, mariée avec un enfant fréquentait plus qu'assidûment l'église. Quand à ses deux soeurs, dévôtes elles aussi, célibataires et dotées d'un physique à se damner se réservaient pour le mariage (moi qui croyait que ce genre de chose n'existait encore que dans les livres). Bon techniquement vu que ces braves gens étaient de confession protestante, cela exclue de facto une quelconque appartenance à l'honorable société. Il n'empêche que cela stimule l'imaginaire.

Le sud de la ville coincé le long de la rocade présente les anciens quartiers olympiques ou la plupart des immeubles ont été recyclés à la va vite pour fabriquer à tour de bras du logement social avec les résultats déplorables de ghetto que l'ont imagine. Des bandes violentes se sont créées, comme les événements de l'an passé l'ont encore prouvé. Il est presque souhaitable que le grand banditisme persiste en ville, cela tempère les ardeurs. On trouve par la bas de véritables zones franches, des rues où l'ont craint de s'aventurer même en plein jour. Des rues ou des bâtisses sont écroulées sur l'asphalte de la route, ou les débris de voitures brûlées restent sans que personne ne se préoccupe de les enlever. Ce genre d'endroits ou personne ne vous entendra crier.
Si l'on descend encore un peu vers le sud (la fameuse route Napoléon qui mène à Gap, Sisteron) on arrive dans les usines chimiques de Pont-de-Claix qui défigurent le paysage mais aussi produisent du Chlore, de la Javel et autres joyeusetés (vous voulez du phosgène par exemple, y en a aussi). Le plus drôle là dedans c'est qu'il y a de nombreux merdoduc non protégés et pas vraiment entretenus pour transporter ces substances hautement toxiques sur des kilomètres. Les explosions et autres accidents plus ou moins graves sont monnaie courante dans le coin. Enfin bref, à côté du sud de Grenoble, AZF fait figure de dînette pour enfants.

A l'ouest de la ville (sur la route qui vient de Lyon), coincée entre le le Drac et l'Isère on trouve la fameuse zone de recherche Minalogic sur les nanotechnologies, les biotechnologies et les technologies pour la santé à la pointe de la recherche mondiale. En survolant la ville, on remarque bien le site grâce à son accélérateur de particules, le synchrotron et son anneau caractéristique. Le commissariat à l'énergie atomique a entrepris cette reconversion de la recherche vers les nanotechs et la santé que très récemment. Il y avait dans le parc six installation nucléaire de base (INB) qui ont commencé leur démantèlement depuis 2006 seulement (le site doit être assaini pour 2012). Pour alimenter encore un peu les inquiétudes scientifiques, on trouve aussi à Grenoble une partie du laboratoire P4 de Lyon (ce labo chargé de travailler sur les virus les plus dangereux de la planète).

A l'est de Grenoble, on change d'univers. D'un côté de l'Isère, le campus universitaire et la ville communiste de Saint Martin d'Hères (seconde ville du département). De l'autre côté se trouvent les quartiers riches, l'immense centre hospitalier universitaire et adossées à la Chartreuse, les demeures des nantis. On trouve aussi la plupart des acteurs majeurs de la recherche sur les nouvelles technologies de l'information dans ce début de la vallée du Grésivaudan (vallée qui file vers Chambery et Albertville). On surnomme d'ailleurs cette zone la Silicon Valley Française. Tel la marée, l'économie monte et descend dictant notamment les différentes folies spéculatives (bulle immobilière par exemple, marché de l'emploi, salaires). Une récession aurait des conséquences désastreuses sur toute l'économie de la région.

Le centre ville, je ne m'y attarderais pas trop. Il faut le dire tout net, la ville est assez laide. Mais les très nombreux parcs et squares permettent d'y vivre très agréablement. Sans compter que comme le disait Stendhal, au bout de chaquee rue, une montagne. Parlons-en des montagnes, car elles sont remarquables. En à peine quinze kilomètres autour de la ville les routes s'arrête et la nature redevient sauvage. A l'ouest, on trouve les Hauts plateaux du Vercors, terres rocailleuses et arides, ses gorges 'profondes', ces glaciers souterrains et ses grottes. Haut lieu de la résistance, berceau de l'alpinisme et de l'escalade ou plus récemment lieu du barbecue de l'ordre du temple solaire. Au nord, la Chartreuse, massif verdoyant et bucolique qui à donné son nom à l'ordre des pères Chartreux (et accessoirement au digestif fabriqué par lesdits curetons). Au sud est, on trouve Belledonne, un massif au caractère alpin plus marqué, les sommets atteignent presque les trois milles mètres. On y trouve des glaciers et et des lacs d'altitude. Il existe bien des fameuses légendes sur les lacs du Dauphiné. Je pourrais évoquer notamment du fameux lac noir et de son îlot central qui émerge les années de sécheresse. Quiconque pose le regard sur cette île perd la vue selon le mythe. J'y ai notamment fait une ballade dans l'été 2003, je n'ai pas vu d'îlot.

Il y aurait encore beaucoup à dire sur Grenoble, mais mes idées s'emmêlent. Je vais donc terminer par une liste à la Prévert de petites choses qui ont marqué mon imaginaire comme source d'histoires...

On m'a prétendu un jour que Grenoble était une ville soumise aux sept risques majeurs. Je serais incapable de dire ce que ça veux dire mais c'est vrai qu'à y réfléchir la catastrophe menace. C'est une zone sismique. La configuration des vallées permet d'y créer des tempêtes violentes. J'ai évoqué à mi mot les risques liés au nucléaire, à l'activité biologique ou aux accidents chimiques. Mais il y a aussi le risque d'inondation, Grenoble étant une ville remarquablement plate et de basse altitude elle est entièrement en zone inondable (les crues de l'Isère ou bien les nombreux barrages hydroélectriques pourraient mener au drame). Bien entendu la région montagneuse est régulièrement sujette aux éboulements et autres coulées de boue. Et bien sûr il y a la pollution. La ville est dans une cuvette, les usines rejettent pas mal et Grenoble représente un carrefour naturel. L'été, les conditions anticycloniques favorisent les couches d'inversion à basse altitude et au dessus de la ville se dessine une sorte de smog, particulièrement visible en montagne. La ville est donc polluée, c'est vrai. Une légende urbaine la présente comme l'une des plus polluée d'Europe, c'est faux (tout ceux qui seront par exemple allés à Athènes peuvent le démentir). L'anecdote veut que ce fût l'une des premières villes à voir son niveau de pollution observé par des capteurs. Parmi l'échantillon des trente villes observées à l'époque, c'était vrai et cette sinistre réputation lui est restée.

Il fait très chaud l'hiver et très froid l'hiver. L'été, c'est proprement invivable (c'est l'époque ou l'on est content de retrouver la fraîcheur climatisée des bureau en allant au boulot). Le temps varie de manière très brusque. L'avantage c'est qu'il fait le plus souvent beau dans la région (sans compter le nuage de pollution au dessus de la ville bien sûr).

Grenoble était encore il y a peu une position stratégique comme l'atteste les nombreux forts abandonnées qui protégeaient la ville (dédales de couloirs obscurs taillés dans la pierre pour l'immense fort de la Bastille, le fort du St Eynard, etc.) La présence militaire dans la région reste encore assez forte. Armées de terre et de l'air principalement.

On pourrait se pencher sur l'histoire de la ville, mais j'avoue ma profonde inculture en la matière. Mis à part bien sûr l'invention de la manif le 7 juin 1788 (si de nos jours on cherche la plage sous les pavés, à cette époque là les CRS recevaient des tuiles, ça doit faire mal aussi) avec le résultat que l'on sait. L'église et la crypte Saint Laurent (vestiges archéologiques des rites funéraires datant de l'antiquité, église carolingienne et cie) est l'un des premier monuments historiques classé. Sous la cathédrale notre-dame, on trouve les restes de l'ancien palais des évêques et d'un baptistère du début de l'ère chrétienne. On trouve aussi des marques des anciens remparts de la ville romaine, des vestiges de la bourgade gauloise de Cularo. Bien d'autres secrets sont enfouis dans les dédales des rues du centre ville. Je me souviens notamment avoir aperçu en ville une tour carrée moyenâgeuse, mais une fois en ville j'ai constaté que cette tour était à peine visible de la rue et impossible à atteindre car au milieu d'un paté de maison dense et infranchissable(étrange pour un monument historique).
Si un historien passe par ici, j'aimerais bien qu'il m'éclaire sur les rapports entre le dauphin et la ville. C'est l'emblème de la région (le "dauphiné" vient de là) et de Grenoble. C'est de là que vient aussi que vient le titre des anciens seigneurs de la région et la désignation habituelle de l'héritier du trône. Pourtant on ne peut pas dire qu'il y a beaucoup de dauphins dans l'isère, le drac ou bien les lacs de montagnes.

Je pourrais aussi évoquer les rapports qu'entretient la jeunesse avec les substances psychotropes. C'est amusant de constater lorsque l'on s'écarte un peu des sentiers battus en montagne de trouver des plans de chanvre indien pousser de manière plus ou moins domestiquée. Ou encore ces hordes d'étudiants barbus et chevelus qui trouvent que l'automne est une bonne saison pour les champignons, surtout le genre des psilocybes très courants dans Belledonne.

Enfin bon bref, je me fait long. Il est temps de conclure. Même si je n'ai jamais eu le temps de maitriser un tel scénario, Grenoble est à mon avis un bon cadre pour des aventures contemporaines. Maffieux, sombres secrets et rituels homicides, survival horror et catastrophes plus ou moins préméditées vous attendent.