mardi, juillet 20, 2010

Songbird looking for happiness…

Nous autres les oiseaux nous contentons de peu, survivre à l’hiver, trouver de quoi manger, partager de tendres moments avec l’oiselle de nos rêves, échapper aux instincts ataviques des chats en maraude. Tout cela suffit à notre bonheur.
L’autre soir je m’étais égaré dans la douceur nocturne des soirées estivales lorsqu’un filet de musique se fit entendre. Attiré par les rythmes trainants et la beauté des accords mineurs, je remontais à tire-d’aile la mélodie à sa source, un groupe qui se produisait en plein air, attirant les oiseaux chanteurs dans mon genre, tel un phare au milieu de la nuit.
Du haut de ma branche, je profitais du spectacle et contemplais le paradoxe de l’humanité. Les musiciens swinguaient sur les notes bleues pour exprimer leurs peines et leurs malheurs, tandis que la foule se pressait pour danser. On prétend que passé les besoins prima
ires et vitaux, l’être humain ne recherche qu’une seule chose, le bonheur. Et le voila qui se dandine gaiement au spectacle étalé de la tristesse.
Avec orgueil, Laurent Gounelle intitule son prétendu roman l’homme qui voulait être heureux, mais n’est ce pas le désir de l’humanité toute entière ? Cette même humanité qui se complait dans la fange de son malheur ?
Je me suis fait offrir par hasard ce livre. Et donc je l’ai lu. Première constatation, si on le trouve au rayon des fictions, ce n’est qu’une ruse pour attirer le client, ce n’est pas un roman. La quatrième de couverture évoque Bali, l’un des derniers paradis terrestres, elle esquisse la rencontre initiatique entre deux mondes, celui du touriste désœuvré et celui du gardien de la sagesse.
Force m’est de constater que tout ceci n’est qu’un prétexte. Tout comme les vénérables textes de Platon présentaient de manière ludique les fondements de la philosophie classique, les rencontres avec le vieux guérisseur ne sont qu’un habillage pour véhiculer les leçons un peu désuètes du développement personnel.
S’il est un rayon que j’ai tendance à éviter dans les librairies c’est bien celui qui parle du développement personnel. En dépit de mes aspirations romanesques, j’ai malheureusement cessé de croire au père noël. J’aimerais y croire, j’essaie d’y croire mais je SAIS qu’il n’existe pas. Alors tous ces manuels qui prétendent en quelques centaines de pages donner un mode d’emploi pour résoudre les problèmes personnels, ça me laisse songeur. D’une part de telles entreprises me paraissent impossibles, mais surtout les auteurs de tels ouvrages me semblent plus attirés par l’argent que par le bonheur de leur prochain.
Et le livre de Laurent Gounelle me conforte dans mes opinions. Le propos oscille entre le fantaisiste et le gentillet mais un peu niais. La profondeur de la réflexion m’évoque la pataugeoire de la piscine municipale, on ne risque pas de s’y noyer, à moins d’avoir moins de trois ans.
Les pigeons ne sont pas de bons oiseaux chanteurs, ils sont trop crédules. Si l’aspect mercantile de les détrousser par des rêves comme L’homme qui voulait être heureux me chatouille un peu, je dois rester honnête et arrêter de tirer sur l’ambulance.
Même si le fond du propos de ce livre à savoir "quand on veux, on peux" reste simpliste, il est très positif. Il y a d’autres sujets plus valables pour s’indigner. Après tout, si cela agit comme un placebo et améliore la vie des gens qui y croient encore, pourquoi pas. De fait, le livre est très agréable à lire, les anecdotes et pensées du guérisseur m’ont parfois poussé à réfléchir. On s’identifie facilement avec le narrateur et l’on finit de bon cœur le livre.
Je ne le recommanderais certes pas à l’achat, sans pour autant condamner sa lecture. Les oiseaux aussi ont leurs paradoxes. Le concert est terminé, il est temps pour moi de rentrer au nid. Trouver le bonheur en compagnie d’une madame oiselle, probablement fâchée de me voir rentrer si tard.
Piou-piou got the blues !

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