Les antipodes ont ce défaut d'être situées précisément à l'autre bout du monde. Et sur notre si petite planète bleue, l'autre bout du monde c'est déjà loin, très loin. Délaissant mes préoccupations écologiques pour me rendre en Polynésie, j'ai donc pris l'avion, cette espèce de boite de conserve propulsée par des tonnes kérosène afin de tenir miraculeusement dans les airs. Et malgré la vitesse de ce genre d'appareil, il faut quand même compter vingt heures pour arriver à destination. C'est long, très long.
Le rapport de temps est passablement différent mais c'est une perte de temps assez comparable aux transports en commun quotidien pour aller travailler. Donc pendant vingt heures, on s'occupe comme on peut. Et notamment j'ai lu. Coincé au milieu du ciel, ça me semblait de circonstances d'entamer Anges et Démons de Dan Brown.
J'avais déjà lu son succès interplanétaire du Da Vinci Code. Le roman était servi par une écriture simple mais efficace. En dépit des accusations de plagiat, l'intrigue était ambitieuse et l'idée de base géniale. Malheureusement, comme souvent avec les idées trop ambitieuses, le final n'était pas à la hauteur. Et pourtant ce livre m'avait plu, surtout par son aspect ludique à proposer au lecteur des énigmes à résoudre en même temps qu'une ballade néophyte dans l'histoire de l'art.
Me voilà donc à nouveau plongé dans les palpitantes aventures de Robert Langdon dans un nouveau thriller, au milieu des complots millénaires et des symboles cachés de l'histoire de l'art. Bien mal m'en a pris. Si l'on peut difficilement qualifier le Da Vinci code de chef d'œuvre, il est encore plus délicat d'attribuer à son prédécesseur la qualité de brouillon. Et pourtant, dans ce livre on sent les prémices du futur best-seller, le talent en moins.
L'intrigue est une copie conforme. Outre le même narrateur, on retrouve l'assassiné de la première scène qui déclenche l'action. Comme d'habitude c'est la jolie jeune fille adoptive du malheureux qui se retrouve aux côtés du héro durant l'action. Sans aucune pudeur j'oserais révéler que le roman se terminera par une scène d'amour entre les deux tourtereaux. Au cœur du roman, un jeu de l'oie sur l'histoire de l'art pour rebondir d'indice en indice dans les chefs d'œuvres du patrimoine Italien. Il y a toujours un tueur mystérieux et solitaire, froid, efficace et implacable, appartenant à une confrérie secrète centenaire. La construction même de l'alternance des chapitres avec les points de vue croisés du meurtrier et de Robert Langdon est la même que pour le code Da Vinci. On troque la lutte millénaire entre l'église catholique et le prieuré de Sion, contre la même église catholique attaquée par les Illuminati. Ce n'est plus l'opus Dei qui emploie le tueur mais la secte des hashishiyyin. Bonnet blanc, blanc bonnet, tout ça.
Sauf que cette fois ça ne marche pas. Déjà, l'aspect ludique des indices dissimulés dans les œuvres perd de sa nouveauté et semble le plus souvent tirée par les cheveux. Les contre-vérités historiques, les approximations et les hypothèses invraisemblables s'enchaînent. La problématique posée est moins ambitieuse, à savoir un vieux groupe qui décide de se venger de l'église catholique comme prétexte à une resacralisation du monde. Enfin et surtout le narrateur est proprement insupportable. Tout d'abord dépeint comme un simple professeur d'université, du genre veste en tweed et long dimanches dans les bibliothèques, il deviendra au fil des pages un athlète accompli capable de rivaliser avec un tueur surentrainé ou bien de sauter d'un hélicoptère sans parachute. Le tout en moins de deux jours.
En bref et même si le livre se lit facilement et au final permet de passer le temps, je ne le recommanderais vraiment pas.
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