mardi, août 25, 2009

Perdu dans le ciel, à regretter les anges et les démons

Les antipodes ont ce défaut d'être situées précisément à l'autre bout du monde. Et sur notre si petite planète bleue, l'autre bout du monde c'est déjà loin, très loin. Délaissant mes préoccupations écologiques pour me rendre en Polynésie, j'ai donc pris l'avion, cette espèce de boite de conserve propulsée par des tonnes kérosène afin de tenir miraculeusement dans les airs. Et malgré la vitesse de ce genre d'appareil, il faut quand même compter vingt heures pour arriver à destination. C'est long, très long.

Le rapport de temps est passablement différent mais c'est une perte de temps assez comparable aux transports en commun quotidien pour aller travailler. Donc pendant vingt heures, on s'occupe comme on peut. Et notamment j'ai lu. Coincé au milieu du ciel, ça me semblait de circonstances d'entamer Anges et Démons de Dan Brown.

J'avais déjà lu son succès interplanétaire du Da Vinci Code. Le roman était servi par une écriture simple mais efficace. En dépit des accusations de plagiat, l'intrigue était ambitieuse et l'idée de base géniale. Malheureusement, comme souvent avec les idées trop ambitieuses, le final n'était pas à la hauteur. Et pourtant ce livre m'avait plu, surtout par son aspect ludique à proposer au lecteur des énigmes à résoudre en même temps qu'une ballade néophyte dans l'histoire de l'art.

Me voilà donc à nouveau plongé dans les palpitantes aventures de Robert Langdon dans un nouveau thriller, au milieu des complots millénaires et des symboles cachés de l'histoire de l'art. Bien mal m'en a pris. Si l'on peut difficilement qualifier le Da Vinci code de chef d'œuvre, il est encore plus délicat d'attribuer à son prédécesseur la qualité de brouillon. Et pourtant, dans ce livre on sent les prémices du futur best-seller, le talent en moins.

L'intrigue est une copie conforme. Outre le même narrateur, on retrouve l'assassiné de la première scène qui déclenche l'action. Comme d'habitude c'est la jolie jeune fille adoptive du malheureux qui se retrouve aux côtés du héro durant l'action. Sans aucune pudeur j'oserais révéler que le roman se terminera par une scène d'amour entre les deux tourtereaux. Au cœur du roman, un jeu de l'oie sur l'histoire de l'art pour rebondir d'indice en indice dans les chefs d'œuvres du patrimoine Italien. Il y a toujours un tueur mystérieux et solitaire, froid, efficace et implacable, appartenant à une confrérie secrète centenaire. La construction même de l'alternance des chapitres avec les points de vue croisés du meurtrier et de Robert Langdon est la même que pour le code Da Vinci. On troque la lutte millénaire entre l'église catholique et le prieuré de Sion, contre la même église catholique attaquée par les Illuminati. Ce n'est plus l'opus Dei qui emploie le tueur mais la secte des hashishiyyin. Bonnet blanc, blanc bonnet, tout ça.

Sauf que cette fois ça ne marche pas. Déjà, l'aspect ludique des indices dissimulés dans les œuvres perd de sa nouveauté et semble le plus souvent tirée par les cheveux. Les contre-vérités historiques, les approximations et les hypothèses invraisemblables s'enchaînent. La problématique posée est moins ambitieuse, à savoir un vieux groupe qui décide de se venger de l'église catholique comme prétexte à une resacralisation du monde. Enfin et surtout le narrateur est proprement insupportable. Tout d'abord dépeint comme un simple professeur d'université, du genre veste en tweed et long dimanches dans les bibliothèques, il deviendra au fil des pages un athlète accompli capable de rivaliser avec un tueur surentrainé ou bien de sauter d'un hélicoptère sans parachute. Le tout en moins de deux jours.

En bref et même si le livre se lit facilement et au final permet de passer le temps, je ne le recommanderais vraiment pas.

vendredi, août 21, 2009

Un oiseau bleu qui a mal aux yeux


J'avais déjà évoqué mon expérience de l'an passé avec la lecture touristique. Et bien j'ai remis ça.
Il se trouve qu'au tout début de l'été j'ai eu l'occasion d'aller vérifier si la terre était ronde et si les hommes qui se trouvaient à l'autre bout du monde ne marchaient pas à l'envers. Au risque de m'attirer l'ire des jaloux, j'ai effectivement visité les plages blanches encombrées de paisibles cocotiers et me baigner dans les nuances de bleu impressionnistes de la Polynésie Française.
J'avoue qu'à ce moment là, d'autres préoccupations titillaient mon imaginaire que des aventures fantasmées dans le papier. Il y a tellement de choses à faire sur place que la farniente bouquinante ne m'a jamais attrapé.

Du coup, juste un petit livre pour trois semaines de voyages. Un recueil de nouvelles pour ne pas se faire prendre au piège d'une intrigue sur trois cents pages. Des histoires simples pour ne pas ajouter à l'insolation la migraine du lecteur forcené. Et comme il s'agissait de lectures touristiques, je vais vous commenter Le bleu qui fait mal aux yeux de Alex du Prel.

Je ne sais pas si c'est la volonté de l'éditeur ou bien le narcissisme de l'auteur mais on commence par une impressionnante biographie de l'auteur. On y découvre ainsi un aventurier qui a pas mal bourlingué dans sa carrière avant de se mettre à l'écriture pour raconter sa vision de la Polynésie. C'est un fait, le quidam est amoureux de la région, il se veut poète mais ce n'est absolument pas un écrivain. Déjà, sa plume se perd dans les superlatifs pour décrire le paradis sur terre, ça en devient lassant. Mais c'est surtout le fond du discours qui pique aux yeux, gentillet pour ne pas dire complètement niais.

Pour résumer l'intégralité du livre, on se contentera d'un nostalgique "c'était mieux avant". Il semblerait que les polynésiens vivaient une utopie dans les temps anciens, vu l'environnement on peut le comprendre. Et puis les occidentaux sont arrivés et ils ont tout gâché. Ces salopards n'ont absolument pas cherché à comprendre et à respecter le peuple des iles mais ont cherché à imposer leur mode de vie et leurs manières. Société de consommation uniformisée, l'homme blanc qui ne comprends pas et qui détruit ce qu'il touche, bref des lieux communs.
Nos anciennes habitudes colonialistes donnent certes un écho réaliste à ce refrain. Mais dans le thème des méfaits du colonialisme, je préfère de loin la vision d'un Mike Resnick avec son infernale comédie qui donnent une réelle dimension dramatique et entrainent une réflexion vertigineuse. Ici, la profondeur de l'analyse n'est pas au rendez-vous, le discours ne va pas plus loin qu'une glorification passéiste. Alors le même couplet sur une douzaine de nouvelles c'est trop.
C'est dommage car il y a une certaine tendresse dans l'écriture et quelques pages suffisent à nous restituer cette chaleur humaine incomparable qu'on trouve dans les iles du bout du monde.

Malheureusement, une ambiance chaleureuse ne suffit pas ça faire un bon livre. En l'occurrence, ça n'en fait pas un mauvais non plus. Juste un petit truc à lire avant d'aller piquer une tête dans les plus beaux lagons du monde.

mardi, août 18, 2009

L'oiseau faussaire

Une revue de lecture, c'est finalement un prétexte. Un prétexte pour parler de soi, mais aussi un prétexte pour parler tout court. Face à la mélancolique fixité d'un écran d'ordinateur, parler n'est rien, il faut écrire. Écrire pour soi bien sûr, mais surtout écrire pour une multitude virtuelle.

Voilà ma motivation profonde au travers de ce blog. Lorsque l'inspiration me fait défaut, que l'imaginaire s'enfuit, je trouve un cadre pour écrire. Commenter mes lectures récentes est généralement facile et j'aime à croire que cela contribue à affuter ma plume.

Mais voilà, de temps à autres mes lectures ne m'inspirent rien. Voilà peut être l'émergence d'un nouveau concept, l'indifférence littéraire. En parler devient alors singulièrement difficile et rédiger quelques lignes sur ce blog tiennent plus du remplissage que de l'écriture.
A chacun son fardeau, j'assumerais donc ce rôle que je me suis choisi en vous parlant des Falsificateurs de Antonio Bello.

Le roman est assez bien écrit, la prose est fluide et efficace, l'idée de base est tout simplement géniale. Mais encore une fois le traitement emmène l'ouvrage dans mon panthéon des belles idées gâchées.
Le postulat de base est qu'il est possible de modifier la réalité en manipulant l'information. Une organisation secrète, le consortium de falsification du réel, cherche ainsi à transformer ou à inventer de toutes pièces des évènements historiques afin d'orienter la marche du monde. Inventer une nouvelle espèce en voie de disparition ou bien répandre la rumeur de la première chienne dans l'espace nommée Laïka représente un sacré travail. La puissante CFR profite de l'actualité pour la manipuler, manœuvre les médias, créée de fausses preuves. Après tout, si l'on falsifie les rapports et les archives, que l'on manipule les images et les textes liés à un évènement comment la multitude n'ayant pas observé directement l'évènement pourrait elle faire la différence entre la réalité et la fiction. C'est un travail colossal car souvent l'information se répand rapidement et les sources sont multiples et insoupçonnées.

L'histoire débute donc avec le recrutement du jeune Sliv Darthunger, fraichement émoulu de l'université de géographie de Reykjavík. Rapidement, il deviendra un scénariste hors pair et gravira les échelons de l'organisation. C'est son imagination qui lui souffle les évènements à manipuler ou à créer. Seulement manipuler la réalité c'est quelque chose, savoir dans quel but c'en est une autre. C'est là le nœud de l'intrigue ne pas savoir qui il sert et pourquoi le perturbe, même si les aspects ludiques de son travail lui permettent de passer outre.
Si les aspects géopolitiques et les jeux de pouvoirs sont très bien décrits et passionnants dans le livre, au final on n'arrive pas à y croire. Je ne suis pas rentré dedans, car déjà le narrateur m'agace avec son arrière goût de premier de la classe et son goût immodéré de la compétition. Ensuite, il y a une certaine légèreté dans la façon dont le CFR confie à de jeunes recrues la possibilité de véritablement changer le monde. Enfin, une fois la dernière page tournée, le lecteur n'en saura pas plus sur le pourquoi de toute l'organisation. Et le comment se révèle souvent boiteux, j'ai la naïveté de croire que manipuler les évènements de première importance doit être sérieusement plus compliqué. Sans compter l'arrière goût malsain que propose l'histoire car après tout, sans sombrer dans la peur du complot et la paranoïa, des gros groupes pourraient parfaitement jouer à ce jeu, avec des objectifs moins innocents que la façade présentée par le CFR.

Au final, je sais qu'il y a une suite et une fin à ce livre mais je ne suis toujours pas décidé à investir dans le deuxième tome. Ce livre va se certainement prendre la poussière dans la bibliothèque anarchique de mon esprit au côté du Tueur de temps de Caleb Carr qui exploite le même concept génial de manipulation de la réalité sans réussir non plus à transformer l'essai.

lundi, août 10, 2009

Little Green Bird

Encore et toujours mes devoirs de vacances. Aujourd’hui je vous propose un tableau de vert et de rouge, une récréation au milieu de toutes mes lectures trop sérieuses ou trop dramatiques. Il s’agit de l’histoire d’un petit homme vert, ou L.G.M, little green man pour ceux qui n’auraient pas le réflexe yuppie de migrer toute expression dans un anglicisme post-moderne pour le dessécher sous la forme d’un acronyme abscons.
Donc cette symphonie composée par Wagner. Nan, pas le compositeur allemand, Roland Charles Wagner notre romancier français, prolifique et souvent déjanté. Je disais donc, dans cette symphonie, la vie existe sur mars et elle a le bon goût d’envoyer sur terre l’un de ses ambassadeur. Un petit homme vert, forcément.
Tout de suite vous pensez à Frederic Brown et son délirant Martiens go home, et vous avez raison. Le livre s’ouvre d’ailleurs sur une citation extraire du quidam et l’ensemble fait beaucoup penser à un hommage à l’œuvre du maître.

Donc une quarantaine d’année avant l’action, les américains et les russes occupés à comparer leur virilité envoyaient des trucs dans l’espace. Ca vidait les caisses du contribuable, mais ça valait déjà mieux que de s’envoyer des bombes à neutrons à la figure. Tout est que les américains avaient envoyé une sonde sur mars. La première image en provenance de la sonde était un petit homme vert, en train de tirer la langue. Dès lors une course s’était engagée pour amener sur mars un équipage. Course remportée par les russes, les premiers à poser le pied sur la planète rouge et en ramener un ambassadeur, vert.
Le roman débute au moment ou le narrateur est chargé de retrouver la trace du martien, kidnappé par une bande de hippies. Il retrouve bien vite l’ambassadeur qui avait tout simplement fugué échapper aux délégations diplomatiques ennuyeuses et goûter au sexe, aux drogues et au rock ‘n roll.
Sitôt retrouvé, le petit homme vert se fera kidnapper pour de vrai par les agents rouges du KGB. Bien sûr notre narrateur, agent secret des services français sera dépêché à sa recherche. Une course poursuite excentrique et haletante nous tiendra alors en haleine jusqu’à la dernière page. Nous visitons une uchronie farfelue ou la guerre froide ne s’est pas arrêtée. Les américains sont sur le déclin et leur pays rongé par les ambitions démesurées du petit buisson se morcelle en états sécessionnistes comme la Californie, dirigée par le leader charismatique des Dead Kennedys. De leur côté, les russes s’ouvrent à une vraie démocratie et remportent petit à petit la victoire pour la suprématie mondiale. Je n’en dévoile pas plus mais l’histoire rebondie souvent dans des directions inattendues et rocambolesques.

Les intermèdes sous la forme de dépêches et d’extraits des journaux internationaux nous familiarisent avec cette tranche alternative de l’histoire. Les citations et références truffent le texte pour détourner les icônes de la culture populaire moderne. Le résultat est croustillant et savoureux, on se surprend à délaisser l’intrigue pour dénicher les références, trouver des indices et se bidonner devant un Daniel Balavoine chantant je ne suis pas un martien.

Au final le roman est assez plaisant à lire et divertissant. Certainement pas l’œuvre du siècle mais un sacré bon moment. Malheureusement, ce genre de livre risque vieillir très vite, trop référencé et trop engagé contre les impérialismes divers.

dimanche, août 09, 2009

Un oiseau maudit

Il fait beau aujourd’hui et pourtant je paresse à la maison. Retenu par la conscience aigue de ces milles choses à faire. Milles petites corvées de la vie quotidienne comme autant de boulets pour entraver ma résolution d’en accomplir une seule.
Mettre à jour ce petit blog et rattraper un retard chronique dans mes revues de lectures en fait partie. Alors me voici coincé devant l’ordinateur alors que le soleil brille. Tant pis pour vous. Je vais parler de la mort et de la manie de la grande faucheuse de couper le fil de nos pauvres existences. La plupart du temps, la fin de nos vies anonymes n’affectent pas la marche du monde et les échos s’arrêtent bien vite. Il en va autrement lorsque la gloire et la célébrité ont illuminé le pauvre défunt. C’est alors que les médias s’emparent de la tragédie pour faire remonter à la surface les bulles de la mémoire et que des milliers de philistins découvrent les faits des grands hommes.
C’est ainsi que j’ai appris la mort de Maurice Druon, pour moi l’un de ses poussiéreux écrivains d’avant guerre. Le nouvelle ne m’a pas trop touché jusqu’à ce je fasse le rapprochement avec son œuvre majeure sur les rois maudits. Dans mon esprit c’était surtout une série télévisée populaire dont je m’étais promis de visionner le remake récent. La saga des rois maudits est également l’une des sources d’inspiration des chroniques du trône de fer dont je suis friand.
Le coup de projecteur de la mort aura fini par me décider à acheter les premiers livres de la saga, à savoir le roi de fer, la reine étranglée et les poisons de la couronne.

L’ouverture du premier livre donne le ton avec la fin du procès des templiers et l’annonce du jugement de Jacques de Molay. L’un des hommes les plus puissants de son temps réduit aux haillons d’un prisonnier commun après sept ans d’un procès inique et calculé. Sur le bûcher le grand maître aurait prononcé une malédiction restée célèbre :
Pape Clément ! Roi Philippe ! Avant un an, je vous cite à paraître au tribunal de Dieu pour y recevoir votre juste châtiment ! Maudits ! Maudits ! Tous maudits jusqu'à la treizième génération de vos races !
Cette déclaration est probablement fausse. Mais elle donne le thème de la saga des rois maudits. Page après page, nous seront captivés par le destin funeste des derniers capétiens. Entre adultère et empoisonnement, cabales et complots la famille royale va s’éteindre rapidement. C’est dramatique, mais c’est un vrai régal à lire.
Malheureusement, la qualité de l’écriture est inégale entre les chapitres, du soporifique au burlesque on se demande si c’est le même auteur qui a écrit l’ensemble. La rumeur voudrait que non et que Maurice Druon ait réuni des collaborateurs pour sa saga. Malgré tout l’ensemble reste très bon et l’on oublie vite les chapitres un peu légers.

Moi qui affectionne les sombres machinations politiques et les trahisons en tout genre, je n’ai pas été déçu. Quel frisson de penser que la richesse de l’intrigue et les sommets du drame sont inspirés par notre passé. La vocation pédagogique d’un tel ouvrage n’est pas non plus laissée de côté. Comprendre les bouleversements politique et sociaux de l’époque donne une lumière passionnante sur nos institutions actuelles. Dans ce livre on découvre véritablement comment notre pays s’est créé. D’autant plus qu’une riche collection de notes historiques et biographique nous immergent dans l’époque, sans rendre la lecture pesante.

Je me suis arrêté au bout du troisième tome parce que l’on m’avait prévenu que la suite était moins intéressante et j’avais d’autres priorités sur ma pile de lecture.
Mais j’y retournerais un jour, c’est forcé.

samedi, août 08, 2009

Les oiseaux ont chanté

Où est passé le joli mois de mai avec ses bourgeons et ses oiseaux qui chantent? Il est venu, puis s’en est allé. Les mois ont défilé et sur les arbres les bourgeons fleurissent mais pas les billets sur cette branche perdue dans la toundra numérique.
Tout ça pour dire que je suis sacrément en retard de mes revues de lectures.
Les raisons et les excuses ne manquent pas. Sur mon petit carnet, j’ai même un mot d’excuse signé par l’adjointe au maire du petit patelin où j’habite. Tout ça pour un simple petit "oui". Moi qui d’habitude prends plaisir à jongler avec les mots, me voilà perdu face à trois petites lettres, communes et banales. Malgré mes préoccupations nuptiales, je n’ai pas lâché mes romans et nouvelles.
L’amour, le sexe et autres préoccupations sentimentales me fournissent une magnifique introduction. C’est encore l’été et malgré le retard, je peux toujours commencer mes carnets de vacances pour vous faire la revue d’un Roman avec cocaïne de M. Aguéev.

Comme c’est l’un des points qui poussent la plupart des lecteurs curieux à lire ce livre, je suis bien obligé de dire quelques mots sur l’auteur. M. Aguéev (Maurice ? Marcel ? Un prénom russe imprononçable ?) est un mystère. Il n’est connu que pour quelques manuscrits, dont le roman avec cocaïne, envoyés à un éditeur parisien. Roman presque anonyme, l’auteur n’a laissé aucune adresse et n’a jamais été formellement identifié. Il faut dire que dans les années 30 évoquer crûment les réalités sombres de la drogue et du sexe fait scandale. Quantité de légendes circulent au propos de M. Aguéev, et de son mystérieux envoi expédié de Constantinople. Est-ce un roman autobiographique ? Est-ce un prête-nom pour un illustre Nabokov ou autre ne voulant pas se salir la plume, l’auteur est-il encore vivant de nos jours. Les émanations de souffre de l’ouvrage sont encore bien sensible presque un siècle plus tard et son talent intact nous touche toujours.

Nous sommes à Moscou, pendant la première guerre mondiale mais les horreurs de la guerre ne touchent pas la jeunesse oisive du lycée. On découvre Vadim, un jeune lycéen observateur cynique de son époque. Il se présente comme un jouisseur méprisant et brutal pour qui le tableau de la vie c’est d’abord le quotidien du lycée ou les machinations sociales permettent de grappiller de l’influence, pour qui les femmes ne sont que des faire-valoir d’un "enfant prodige érotique".
Mais derrière la carapace, Vadim est un écorché vif qui agit le plus souvent guidé par des impulsions et le désir de paraître. Il souffre de sa propre cruauté et de son comportement, son humanité transpire dans les regrets et les remords qu’il éprouve. A ce titre le deuxième chapitre où il trompe l’innocence de la jeune Zinotchka pour finalement souffrir de l’inutilité de son geste est assez révélateur.
Finalement, Vadim terminera le lycée et rencontrera l’amour. Celui avec un grand A, que tous attendent. Vadim le trouvera et il causera sa perte et sa déchéance. Malgré tout le cliché de ce concept, le regard perçant et la froide analyse livrée par le narrateur, l’étude de l’antagonisme fatal entre sentiment et désir font de ce roman un chef d’œuvre, très loin du côté romantique et fleur bleue du thème abordé.
La dernière partie ou Vadim sombre petit à petit dans la cocaïne est tout aussi magistrale, mais donne à penser que le point d’orgue est passé. C’est une erreur et le dernier paragraphe fait entrer le roman au panthéon des œuvres immortelles.

Ce livre est monstrueux et merveilleux, il est futile et essentiel, en bref il m’a marqué.

jeudi, mai 14, 2009

Un trône de fer, pour que l’oiseau fasse son nid

S’il est un domaine ou la curiosité des sens et le libertinage élèvent l’esprit, c’est bien la littérature. Le lecteur avisé prendra soin de sortir des sentiers battus par des plumes que le succès a rendu paresseuses. Je ne suis pas de ceux là. Lorsque le poète m’a séduit, il m’enchaîne à son oeuvre. Je vois bien lorsque les sagas s’étirent dans la longueur, lorsque la créativité s’assèche. Victime consentante, je me laisse entraîner dans les profondeurs d’une nuit éternelle que la qualité ne vient plus illuminer. C’est plus fort que moi, je veux retrouver le destin des personnages que j’ai appris à aimer, je continue de suivre leurs aventures désormais cousues d’un fil grossier quand elles ne sont pas devenues burlesques.
Il m’est bien difficile de me détacher des boulets de mes amours passés. Il me suffit de songer aux chroniques d’Anne Rice, à l’égarement de la compagnie noire, à l’assassin royal boudeur pour maudire le mauvais goût obstiné qui me pousse à engraisser les rentes de leurs créateurs.

Il arrive cependant que la fidélité soit récompensée. Certains auteurs prennent le parti de ralentir la cadence lorsque la qualité décroît pour ne garder que le meilleur. Le livre dont je vais vous parler s’inscrit dans cette logique vertueuse. J’ai l’impression d’assister à la naissance d’une légende, chaque livre que j’achète jalonne une œuvre immortelle. Malheureusement, l’avenir est comme une catin traîtresse. Elle promet beaucoup et ne rend pas en conséquence. J’espère donc être dans le vrai lorsque je vais vous louer la saga du trône de fer de G.R.R Martin. J’ai acheté le dernier tome paru, un festin pour les corbeaux et une fois de plus je me suis régalé.
C’est difficile de commenter un tel livre car pour lui rendre sa juste valeur il faudrait présenter l’intégralité de la saga. Chose impossible tant l’œuvre est riche et touffue. Le trône de fer, traduction malheureuse de A song of ice and fire raconte l’histoire du royaume imaginaire de Westeros. C’est un monde médiéval fantastique sombre et violent qui s’enfonce inexorablement dans la guerre civile.
Il est important de pointer malgré mon attachement pour les littératures de l’imaginaire, ce qui a été commis sous l’étiquette moderne du médiéval fantastique relève la plus souvent de la fange. Rares sont les exceptions à mes yeux, même le vénérable seigneur des anneaux ne subsiste dans mon palmarès qu’en sa qualité de précurseur. Il me semble m’être déjà appesanti sur les clichés insupportables du genre.
Avec le trône de fer, point de prophétie séculaire ni de groupe d’aventuriers improbable, encore moins le sempiternel voyage initiatique d’un gamin insupportable. Non, l’époque baigne dans l’ignorance crasse et les craintes superstitieuses, les protagonistes ne sont pas très nombreux à survivre à la voracité brutale des nobles et leurs jeux de pouvoirs. Si l’action se concentre dans les premiers tomes sur le destin d’une famille noble aux idéaux chevaleresques. Très rapidement, la faucheuse agite son sablier, la famille éclate dans le sang et le malheur tandis que le royaume sombre dans une guerre de succession impitoyable. On s’attache petit à petit aux survivants, qu’ils soient bons ou malveillants, courageux où comploteurs. On apprends avec eux à découvrir les différents partis en présence ou le blanc et le gris se fondent dans les lueurs changeante d’une mer grisâtre. Je n’ai jamais vu une telle galerie de personnages, tous si vivants dans la profondeur de leur caractère et de leur vécu.
Il existe 12 tomes traduits en Français à ce jour (étrangement l’œuvre originale contient quatre tomes et a été découpée par les éditeurs Français sous les auspices de la rentabilité économique). L’auteur prend son temps écrire et parfois on se trouve pendant plusieurs années sans rien avoir à se mettre sous la dent. Et dès lors qu’un nouveau tome apparaît nous voilà replongé dans l’histoire tumultueuse des sept couronnes. G.R.R Martin atteint le génie lorsqu’avec quelques pages ils nous remémore l’histoire passée dans toute sa richesse et nous entraîne encore et encore sur de nouvelles pistes, défriche de nouveaux thèmes, et nous présente des problématiques insoupçonnées.
Enfin bref, avec le festin pour les corbeaux, j’ai repris une dose et c’est toujours aussi bon.
L’autre défaut de ces histoires qui durent dans le temps c’est que lire est beaucoup plus rapide qu’écrire. Et que la lecture de ce dernier tome a provoqué en moi un tel manque que je me suis empressé d’acheter une compilation de deux nouvelles du même auteur, dans le même univers. Quelques centaines d’années plus tôt on suit les aventures du Chevalier errant et de l’épée lige. On ne retrouve point la grandeur et le souffle épique de la saga du trône de fer, juste l’histoire d’un chevalier, véritable chronique moyenâgeuse transposée dans l’univers de Westeros. C’est très agréable à lire et le côté optimiste de ces histoires a quelque chose de rafraîchissant dans cet univers sombre et brutal.

jeudi, avril 30, 2009

J’ai la mémoire qui flanche…

Je n’ai pas encore l’âge pour laisser mon esprit sombrer dans les eaux profondes d’Alzheimer. Et puis j’ai toujours eu la mémoire capricieuse. Il n’empêche, que ne pas se souvenir d’un livre lu la semaine passée c’est un comble. Hier soir je commençais un petit laïus sur mon livre de chevet actuel lorsqu’un doute affreux me saisit. Et si depuis la lecture de la Horde du Contrevent j’en avais oublié un ? J’ai eu beau me casser la tête pendant près d’une heure, pas moyen de savoir qu’est ce qui m’avait échappé. J’en ai conclu que j’avais rêvé.

Et puis ce matin en consultant le registre de mes achats de roman, je suis retombé sur ce titre, L’instinct de l’équarisseur de Thomas Day. J’avais déjà été très déçu par l’automate de Nuremberg du même auteur. L’idée était géniale mais la réalisation bâclée. J’avais donc donné une deuxième chance à Thomas Day, peine perdue apparemment.
Dans l’instinct de l’équarisseur, le personnage principal est Conan Doyle. Oui, le plus que célèbre papa de Sherlock Holmes. Mais dans cette histoire, Sherlock Holmes existe vraiment. Dans un monde parallèle au nôtre ou Conan Doyle est embaucher pour relater les affaires du célèbre enquêteur.
Seulement l’univers de Sherlock Holmes est très différent du notre car une race extra-terrestre y a rapporté sa technologie avancée. Les Worshs sont des sortes de petits oursons en peluche à la fourrure orange comme nés du croisement incestueux entre Winnie et son compère Tigrou. Du coup, les inventions fantasques et délirantes du steampunk ont changé le monde. Londres s’appelle Londen et Sherlock y est un cocaïnomane névrosé et sadique qui défoule ses pulsions au travers de ses activités d’assassin mandaté par la reine. Son camarade Watson y est un savant fou, l’inventeur de la machine pour passer d’un monde à l’autre.
Bref résumé ainsi en quelque lignes, ça donne envie à tous les férus d’imaginaire tel que moi. C’est d’ailleurs pour ça que je l’ai acheté.

Au final le livre n’est pas franchement mauvais. Le sujet est traité correctement et l’impressionnante bibliographie documentaire amassée par l’auteur ne s’étale pas inutilement. Mais bon, c’est le genre de livre qu’on oublie. La preuve en est. Quelque chose d’insipide qui fait passer agréablement le temps sans toutefois mériter que l’on y attache trop d’importance.

lundi, mars 30, 2009

Tempête dans une consigne de gare


Les garçons naissent dans les choux et les filles dans les roses affirme l’idiome populaire, comme pour jeter un voile rassurant sur les douleurs de l’enfantement. Le premier livre, du sulfureux Murakami Ryû s’intitule Les bébés de la consigne automatique.

Ils ont ça de pratique au Japon, des consignes automatiques comme on peut en trouver dans les gares par chez nous. C’est bien utile pour laisser les affaires dont on ne souhaite pas s’encombrer. C’est ainsi que de jeunes mères désorientées par une responsabilité vagissante décident parfois d’abandonner leur progéniture dans le destin funeste d’un casier métallique.

Quelques uns s’évadent à force de pleurs et de cris, alertant un employé ou un client de passage. C’est ainsi que les deux protagonistes de l’histoire découvrent un monde hostile.

Le roman suivra leurs errances de l’orphelinat à leur famille d’accueil jusqu’à leur confrontation avec le réel qu’ils rejetteront avec violence. Je n’en dévoilerais pas sur le destin hors normes de ces enfants abandonnés dans une consigne automatique.

Le roman est riche, les nombreux portraits des personnages secondaires lui donnent une assise indéniable. L’action s’enlise parfois dans le glauque, le sexe, la violence ou le trash, sans pour autant attiser l’instinct reptilien et voyeuriste du lecteur. Et c’est dommage, car on observe la mort, la douleur et les drames sans jamais entrer dans le livre. En fait c’est principalement le style d’écriture qui m’a chagriné. Au mieux on pourrait le qualifier de fouillis. L’auteur s’amuse d’un paragraphe sur l’autre à changer de narrateur et de point de vue. Parfois il débute même la biographie d’un personnage secondaire. Et le fil conducteur est parfois si ténu qu’on ne le trouve pas.

En bref, c’était pour moi une découverte de la littérature contemporaine japonaise. Je ne regrette pas, mais ça ne m’a pas vraiment donné envie d’en connaître plus.


Pour ma deuxième critique, ce sera plus léger. La fontaine dont je ne devais plus boire de l’eau, m’est tombée sur le coin de la tronche. Je croyais avoir fait le tour de Terry Pratchett et de ses absurdes mais géniales annales du disque monde. Et par le hasard d’un géniteur qui me laisse à lire ses trouvailles, me voilà pendu aux pages du formidable conteur pour suivre les aventures du fabuleux Maurice et de ses rongeurs savants. Je me croyais immunisé à l’humour loufoque de l’Anglais, mais les ressortissants de la perfide Albion sont sournois. Flairant le fromage, j’ai commencé quelques pages et voilà que le piège s’abat sur moi. Je suis pris par le livre. Impossible de le refermer avant d’en terminer la lecture, quelle sensation délicieuse.

Il est toujours difficile de résumer ce genre d’ouvrage. Le lecteur se noie dans l’enchaînement effréné des situations, la maîtrise du langage et l’inventivité du conte. On sort de la lecture comme d’un long voyage en train, un peu groggy face au monde réel qui a continué de tourner sans nous.

Bien entendu c’est l’histoire de Maurice, qui est un chat fabuleux, pour la simple raison qu’il le dit lui-même. Alors Maurice n’est pas seulement fabuleux c’est aussi un escrocs. Rendu intelligent par les hasards des déchets hautement magiques de l’université du disque monde, il s’est allié à une bande de rats ayant subi le même sort. Le plan est simple, ils ont recruté un jeune musicien sur le bord d’une route et avec lui ils vont de village en village. Les rats envahissent les maisons et répandent la panique. L’arrivée du jeune joueur de flûte est alors providentielle, ce gamin capable de charmer les hordes de vermine et de les entraîner hors de la ville.

Jusqu’au jour ou la petite troupe arrive dans un village un peu spécial, ou des rats sont déjà installés. Des rats qui pillent les réserves de nourriture. Sauf qu’à première vue, aucune trace de ces rats. Maurice et ses camarades sont tombés sur un os. Alors entre la fille du potentat local qui essaie de transformer la réalité pour retrouver vivre des aventures dignes des contes de fées et les chasseurs de rats pas tibulaires mais en tout cas furieusement malveillants, un grand chaos s’installe.

Enfin bref, une chouette histoire à lire. Comme souvent avec Pratchett, la trame narrative devient plus laborieuse à partir du deuxième tiers du livre. Les délires mystiques s’immiscent dans le texte et l’effet de surprise du burlesque s’atténue. Pour ne pas dévoiler la fin, je dirais que ça se termine par un classique ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants.


Quel bon vent amène donc ma dernière critique. Le vent doux qui caresse les blés, le vent âpre qui dessine les mers de dunes ou le vent furieux qui fait paître ses blancs moutons au sommet des vagues ? C’est plus probablement un vent poète et mystique qui a dicté à Alain Damasio sa horde du contrevent.

C’est une œuvre étrange et inclassable que les esprits simples des librairies de consommation ont classé avec la science fiction faute de mieux.

C’est sûr que dans les rayons poussiéreux de la philosophie, coincé entre Confucius et Descartes, je ne l’aurais pas découvert. Pour être tout à fait honnête, j’avais été interpellé par cet ouvrage en suivant le fil d’une discussion sur internet. Le roman présentait la singularité de commencer à numéroter les pages par la fin pour remonter peur à peu jusqu’à l’origine mystique de la première page.

Pendant près de 700 page, j’ai donc suivi le destin de la horde qui remontait face aux vents contraire. Imaginez ça un instant, une bande de terre d’à peine 5000 kilomètres de large engoncée entre des pôles glacés et inhabitables. A l’aval, la grande cité d’Aberlaas qui à chaque génération forme une poignée de héros. Cette fine équipe doit remonter les terres connues pour découvrir l’origine des vents terribles qui découlent de l’amont. Trente années durant, ils s’obstinent à pied à remonter le courant terrible et souvent mortel qui rase villes et villages. A leur tête le Golgoth, chargé de tracer le chemin, véritable force de la nature dont le courage n’égale que l’orgueil et la détermination. Suivent le traceur, scribe, troubadour, aéromètre, feuleuse et toute une équipe de personnages hors du commun. La 34ème horde découvrira-t-elle l’amont et ses secrets ? Vous le saurez en lisant le livre.

Je voudrais m’attarder un peu sur le style du livre souvent riche et coloré à l’indigestion. Les mots sont parfois vidés de leur sémantique pour que leur syntaxe rythme le texte. C’est parfois déroutant, souvent surprenant et toujours intriguant. Les pages alternent les points de vue des différents narrateurs, les membres de la horde qui ont chacun une personnalité unique et baroque. Quand à la finalité du roman, c’est clairement d’amener le lecteur à réfléchir, à s’élever par la pensée. Malheureusement, à mesure que le livre avance la mystique prend le pas sur la philosophie, à tel point que certains passages s’enfoncent dans l’ésotérisme au détriment du plaisir de la lecture. Comme je suis peu porté sur l’herméneutique, mon esprit d’un naturel paresseux a oblitéré de ma conscience les passages les plus obscurs, mettant hors de ma portée le Graal de la compréhension.

C’est la note de la faim intellectuelle qui conclura donc cette revue. Une frustration de ne pas avoir compris la vraie portée du texte.

lundi, février 16, 2009

Coming through the rye, poor songbird


L'oiseau s'est fait prudent, avant de se perdre dans les rayonnages des librairies industrielles, il s'est renseigné un peu pour ne pas attraper n'importe quel livre dans les immenses champs de seigle. Il était temps de revenir un peu au classique, mais quoi ?
Finalement, j'ai opté pour la révolte adolescente de l'Attrape-Coeur de J.D Salinger. Un classique des années 50 qui garde encore sa jeunesse malgré le changement de siècle. Le môme Caufield n'a pas pris une ride avec sa colère légitime de l'enfant qui découvre l'horreur du monde des adultes auquel il appartient désormais.
On suit donc la fugue d'un gamin renvoyé de son lycée quelques jours avant noël, ses errances intimes et anonymes dans la ville géante de NewYork. De la séparation du monde du lycée et de ses camarades de chambrée pour un voyage au bout de la nuit. Du séjour bref dans un hôtel sulfureux aux romances improbables en passant par des rencontres inespérées. Derrière la révolte et la morgue, le gamin qui n'aime rien ni personne est finalement fragile et touchant. La mémoire de son petit frère idéalisé mort quelques années plus tôt d'une leucémie le hante et son attachement passionnel avec sa petite soeur le sauvera de la déchéance.
Le style précipite le lecteur dans l'action, le narrateur s'adresse à lui à la première personne pour lui raconter ses étranges journées. Le texte est ponctué d'expressions telles que "ouah"ou "ça me tue" qui agaces à force de répétitions. On sent bien que la pensée du jeune homme n'est pas toujours structurée, il lui arrive de s'égarer et de faire n'importe quoi. Point d'intrigue ou même d'histoire, le roman n'est qu'une succession d'évènements pas forcément ordinaires mais qui s'enfoncent dans la banalité du plausible.
Malgré le style parfois insupportable du gamin qui part dans toutes les directions, malgré l'absence de fil conducteur, on se surprend à se laisser envouter par la magie du texte. Comme Holden Caufield ou voudrait découvrir ou s'envolent les canards de Central Park lorsque le lac gèle en hiver, comme lui on désire tout arrêter et s'enfuir de cette réalité si morne et si triste. Et si plus rien n'a d'importance pourquoi ne pas s'enfuir de l'autre côté de la terre pour vivre dans une maison dans les bois.
Une histoire intemporelle de la perte des illusions de l'enfance, la destruction du bouclier de l'innocence. En bref, j'ai bien aimé. C'est rassurant car cela signifie que ma part d'enfance n'est pas définitivement morte. L'adolescent en moi continue de regarder le monde d'un oeil septique et désabusé.

jeudi, janvier 29, 2009

Des zoulous dans la campagne anglaise et des elfes bleus au milieu du mythe Arthurien...

L'année 2009 débute sous l'épée du grand Damoclès financier. A en croire les prophètes de l'apocalypse notre société s'effondre. Ce n'est pas forcément un mal si un nouveau monde plus juste peu en renaitre. Qu'importe, ce n'est pas très réjouissant alors pour se distraire un peu les neurones, je suis retourné à une littérature plus légère. Une vraie vague rafraichissante après Francis Scott Fitzegerald et Truman Capote. Au programme du mois de janvier, une uchronie dans l'Angleterre victorienne et le mariage du mythe Arthurien avec la fantaisie de Tolkien. Malheureusement, deux déceptions.

Le premier livre qui m'aura accompagné, c'était Zoulou Kingdom de Christophe Lambert. Non, il ne s'agit pas de l'acteur passablement médiocre mais d'un auteur de science fiction pour la jeunesse. Il s'essaye ici à la littérature pour adultes avec l'histoire extravagante d'une tribu de Zoulous venus envahir l'Angleterre victorienne. Il en profite pour faire intervenir en guest stars les célébrités de cette époque formidable, on y trouve bien sûr la reine Victoria, mais aussi Karl Marx, Elephant Man, le jeune H.G Wells et beaucoup d'autres.
Si l'idée était brillante, malheureusement la réalisation ne suit pas. A vrai dire elle traine un peu derrière, elle a comme loupé le train.
Déjà le style m'a rapidement énervé. Visiblement l'écrivain garde des séquelle de ses travaux à destination de la jeunesse. Peut-être aussi qu'il profite sadiquement de se venger de son impressionnant travail documentaire. Tout est qu'il se croit obligé de distiller son savoir sur l'Angleterre victorienne et la révolution industrielle au fil des pages. Il ne le fait pas de manière subtile discrète et pédagogue, au contraire il chausse ses gros sabots du genre "Il faut savoir qu'à cette époque, les gens étaient très pauvres. Très malheureux, ils n'avaient même pas la télévision.".
Sur le fond et la construction même de son livre, le romancier tisse des fils un peu trop gros et paradoxalement usés jusqu'à la corde, le résultat est une tapisserie médiocre et dépourvue d'intérêt. Le plus flagrant concerne l'intégration des personnages connus. Souvent ils apparaissent grâce à des prétextes malheureux et grossiers. Une recette pour faire intervenir Karl Marx, donner l'ambition de syndicaliste à un personnage, qui ne servira qu'à cela. En ce qui concerne le destin des protagonistes anonymes et principaux, il est souvent dénué d'originalité comme cette fille de bonne famille qui se fait engrosser par un docker, ce policier taciturne et désabusé, cet archétype d'aventurier revenu de l'Afrique.
Il est encore plus triste de constater que les personnages les plus originaux ne sont pas du tout exploités. Comme cette reine Zouloue qui aura lié une relation étrange avec l'aventurier évoqué au dessus. On ne saura jamais quel était le lien qui les unissait et elle finira par mourir assez bêtement. Dès que l'auteur trouve un thème porteur, il s'en détourne pour revenir à son sport favori, décrire l'invasion d'une bande de sauvages au milieu de la civilisation. Même le fondement de l'intrique, à savoir comment les Zoulous ont pu se retrouver au milieu de l'Angleterre grâce à l'intervention de Jack l'éventreur paraît pitoyable. On est pressés d'être libéré par la dernière page. Mais la fin aussi est ratée. Un deux ex machina grossier qui libère la ville juste avant qu'elle ne s'effondre. Je ne parlerais même pas des multiples incohérences qui parsèment le récit.
Le livre n'est pas si mauvais, le style est rapide et fluide, quoique irrégulier. De plus, c'est rare mais les notes de l'auteur figurent dans le livre, il détaille ses inspirations et sa bibliographie. De fait c'est probablement le chapitre le plus intéressant. Je garde une certaine rancune envers Christophe Lambert pour avoir ainsi gâché le filon. Au lieu d'un petit livre bâclé de 300 pages il aurait pu débuter une saga fabuleuse.

Deuxième livre, on change d'époque. Déjà ce n'est pas un livre mais trois, une trilogie ré-éditée en poche. Ca ressemble à une affaire mais ce n'est qu'un piège, je gage que si j'avais acheté le premier volume je n'aurais pas continué. Pourtant c'était alléchant, plus de milles pages pour se replonger dans les légendes de la Bretagne des temps anciens, les aventures d'Uter Pendragon le papa du roi Arthur, l'épée Excalibur, l'ile d'Avalon. Une revisite du mythe Arthurien avec des elfes, des nains et des monstres dans la plus pure tradition médiévale fantastique. Décidément, avec sa Trilogie des Elfes, Fetijaine avait bien placé son appât, je me suis fait avoir.
Sur les terres de Bretagne, dix ans après les guerres terribles contres les armées des monstres, les races libres des elfes, des nains et des hommes maintiennent la paix par dans une alliance fragile. Mais un jour, un vieux seigneur nain convoque le grand conseil, un elfe s'est introduit dans le grand royaume de la montagne noire pour voler et assassiner le roi.
Au final, je n'ai pas grand chose à dire sur ce livre. Ce n'était pas suffisamment mauvais pour en devenir remarquable. Ce n'était pas suffisamment mal écrit pour que j'abandonne la lecture. C'est juste un gros pavé que l'on est pressé de finir.
Peut être parce que le mécanisme d'identification ne marche pas très bien. Les personnages vivent et meurent tranquillement sur leurs pages de papier sans parvenir à émouvoir le lecteur. Les temps sont rudes, la mort est fréquente alors rapidement on arrive à une conclusion désabusée, un de plus, un de moins, quelle importance. Les temps sont rudes toujours et puis les trois principales races de ce monde, les humains, les hommes et les elfes se haïssent et ne maintiennent qu'une paix fragile qui volera en éclat dans la première partie. Alors forcément, si les personnages se haïssent, ils ne se parlent pas beaucoup, on a du mal à se faire une place dans leur groupe tant il apparaît comme malsain. C'est d'autant plus bizarre que dans l'histoire, on se trouve souvent confronté à des bandes de héros qui partent à l'aventure. On était habitué à de la coopération et de l'entraide dans les récits fantastiques, là pas du tout, ils s'espionnent sans cesse et n'attendent que l'occasion de se sauter à la gorge.
Se sauter à la gorge, ils le font très souvent d'ailleurs avec la plupart du temps des conséquences funestes. Machin m'a manqué de respect ? Alors je le tue. Machin a révélé que ce n'était pas un page mais le prince de sa nation, alors j'essaie de le tuer, machin veux pas me rendre mon épée magique alors j'essaie de le tuer. Ils étaient sacrément susceptibles à cette époque là. De fait le ressort dramatique principal du roman est amené par des brouilles ridicules entre les personnages. Ça fait léger quand on veux peindre une fresque épique. Et même à la fin lorsque le grand méchant, chef de tous les monstres arrive pour anéantir tout le royaume on est confronté à ces comportement puériles et pitoyables.
Enfin bref cette histoire d'elfes bleus ne m'aurait pas vraiment fait vibrer.

mardi, décembre 30, 2008

Le père noel est passé, la dernière revue de décembre aussi...

Le père noël est passé, mais dans sa hotte rien de culturel cette année. Des appareils de cuisine, c'est pour dire. Vu que j'adore cuisiner, j'en suis ravi. Mais en attendant de préparer des bon petits plats, voici un peu de nourriture pour l'esprit. Ce sera sans doute ma dernière revue de livre de l'année. Au menu, deux monstres sacrés de la littérature américaine.

Je suis tout d'abord revenu à Truman Capote. J'avais été très déçu de sa traversée de l'été comme je l'ai déjà dit et je ne souhaitais pas rester sur cette mauvaise impression d'un roman de jeunesse. J'ai donc lu le roman que beaucoup considèrent comme son chef d'oeuvre, de sang froid. Le livre présente le quadruple meurtre d'une famille de fermiers du Kansas, fait d'hiver sanglant mais profondément banal. L'affaire aura choqué les esprits et la région rurale vivra dans la peur pendant de nombreux mois en attendant que les coupables soit arrêtés.
Truman Capote s'est livré à un travail colossal pour reconstituer les différents aspects de l'affaire. Une minutie et un soin du détail qui transpirent sous les pages. L'histoire se divise ainsi en quatre grande parties. Tout d'abord l'exposition des personnages et notamment les victimes, la petite vie tranquille d'une famille de fermiers durant sa dernière journée et en parallèle les faits et gestes des assassins en devenir. Ensuite l'auteur nous présente les effets du massacre sur la population, la mise en place d'une enquête difficile et la cavale des meurtriers. Il est notable de constater qu'entre le avant et le après le quadruple meurtre, une ellipse importante est faite sur l'acte en lui même et ses causes. Ce qui tient le lecteur en haleine. La troisième partie voit la résolution de l'enquête policière grâce à un témoignage providentiel d'un détenu qui aurait fréquenté les meurtriers. On sait enfin le pourquoi et le comment de l'histoire. Enfin la dernière partie relate le procès des accusés et leurs derniers jours en prison avant l'exécution.
Si cette grande organisation facilite la vie au lecteur et le tient en haleine, la structure même du récit est déroutante. Pionnier de l'effet de conscience, Truman Capote passe d'un personnage à l'autre pour suivre le fil de leurs activités en parallèle sans répit. Mais pire, parfois il ouvre des parenthèses intéressantes mais qui coupent le fil du récit. L'histoire est parsemée de flashback sur la vie des assassins, sur la prise en compte de la psychiatrie dans les procès du Kansas. Au final on se trouve devant un livre étrange, enfantement bizarre du roman et du documentaire.
C'est assez bien écrit mais sans être exceptionnel, l'écrivain préférant nous présenter des faits détaillés que de se laisser aller à des envolées lyriques. Malgré l'atrocité de leur crime et la profonde futilité le l'acte les assassins deviendront finalement humains, malheureux voleurs qui venaient pour l'argent et qui n'auront récolté que quatre misérables dollars.
En bref, ça se laisse lire, mais sans être exceptionnel.

Un deuxième monstre sacré aura occupé mes lectures de décembre. C'est dans le jazz des années folles de l'entre deux guerres à New York que j'ai retrouvé Gatsby le magnifique de Fancis Scott Fitzgerald. L'histoire se passe en 1922, le narrateur venu du middle west pour faire fortune à New York vit dans la périphérie et c'est par hasard qu'il loge dans la banlieue sur un terrain jouxtant la propriété de Gatsby. Gatsby est immensément riche, il organise tous les soirs des fêtes grandioses ou malgré la prohibition tout la jet set vient noyer son insouciance dans le jazz et l'alcool. Un touffu mystère est entretenu sur l'origine de la fortune de Gatsby, son passé et ses liens présumés avec les organisations criminelles. Un sujet de conversation intarissable pour les fêtards qui vivent à ses crochets.
Très rapidement le narrateur deviens l'ami de Gatsby et découvre son but dans la vie, retrouver et séduire la jeune femme dont il était amoureux. Mais cette séduction lui sera fatale. Il mourra seul et sans amis.
Ça ressemble furieusement à l'une de ces mièvres comédies romantiques que j'exècre, mais allez savoir pourquoi cette histoire m'a touché, peut être par son ambiance.

Allez hop, il est temps de terminer mes bagages. L'oiseau migrateur s'en va célébrer la nouvelle année sur l'hémisphère sud.

lundi, décembre 08, 2008

Des crocodiles diaboliques...

J'ai la chance dans mon appartement de posséder un poêle à bois comme principal moyen de chauffage. Comme son nom l'indique, le bois alimente la machine. Pour éviter des allers/retours incessants au stock de bois de chauffe à l'extérieur, je peux empiler quelques buches sous le poêle. Ma table de chevet fonctionne sur le même principe. Juste en dessous se trouve un espace ou j'entrepose mes livres en attente comme autant de combustible pour réchauffer l'imaginaire. Mais le stock de papier imprimé s'en allant diminuant, j'ai du m'armer de ma carte bleue comme d'une hache pour m'aventurer sur dans les forêts obscures de rayonnages libraires. Dans mon petit cabas, j'ai donc ramené quelques livres et voici la critique des deux premiers.

En ce qui concerne le premier, j'ai décidé de mettre de côté mes penchants littéraire pour sciemment acheter un roman de gare. En l'occurrence il s'agissait d'un livre d'épouvante, le diable en gris de Graham Masterton. L'auteur représente, équivalent écossais de Stephen King produit des livres faciles à lire, qui ne laisse pas beaucoup de souvenir mais qui passent agréablement le temps. Je n'ai pas vraiment acheté ce livre pour faire passer le temps, plutôt pour m'instruire. Comment un maitre du genre fait monter le suspense et l'horreur avec de simples mots. De plus l'intrique se déroulait dans les états du sud américain, tout comme ma propre histoire.
La promesse du roman était tenue, un livre facile à lire ou petit à petit l'angoisse monte et noue les tripes du lecteur dans un scoubidou sanglant. Parce que l'auteur n'est pas avare avec l'hémoglobine, c'est certain. Un chapitre sur deux du livre ou presque décrit un meurtre tout aussi sanglant qu'inexplicable. C'est le principe même de l'intrigue, des personnes sont assassinées en plein jour, avec des témoins dans des circonstances impossibles. Jamais personne ne peut voir l'assassin, et celui-ci ne laisse aucune trace. Difficile enquête en perspective pour l'inspecteur Decker. Il recevra de l'aide inattendue de la part d'une jeune enfant trisomique ainsi que de la femme de l'un de ses collègue, une médium. Le pauvre inspecteur affrontera également ses propres démons et fera la lumière sur le meurtre de sa femme qui eut lieu quelques années plus tôt.
Le noeud de l'affaire trouve ses racines dans la magie africaine et la guerre de sécession. C'est l'histoire d'une revanche au travers des siècles. En conclusion, ça se laisse lire. Contrairement à Stephen King, les tenants et aboutissants de l'intrigues ont beau être surnaturels, ils sont expliqués. On termine le livre avec l'impression de comprendre le pourquoi du comment. Pour autant, ce n'est pas un "bon" livre, la style est accrocheur mais pauvre, l'intrigue toute mystérieuse qu'elle soit suit les codes du genre et quelques incohérences viennent troubler la compréhension. Mais bon, ne boudons pas notre plaisir. D'autant plus que si le style de m'a rien appris, le fond du récit et les cultes Santeria sont une véritable inspiration pour ma propre histoire.

Le deuxième roman que je souhaite critiquer est le fruit du hasard et de la sérendipité. Je trainais mes guêtres dans les rayons de la littérature francaise, près des têtes de gondole lorsque mon regard fut happé par les couleurs éclatantes de la nouvelle collection Livre de poche. En effet sur le présentoir une sélection de livres dans des coffrets aux couleurs chatoyantes. Je me suis décidé pour les yeux jaunes des crocodiles de Katherine Pancol. Je n'avais pas bien lu la quatrième de couverture, j'aurais du y prêter plus attention. C'est en effet un roman purement féminin que celui là, à l'image des comédies romantiques insipides que nous servent les studios Hollywoodiens. Il ne s'y passe pas grand chose et les protagonistes ont des hautes pensées philosophico-psychologiques sur la vie en général et l'amour en particulier.
La lecture est sans saveur mais agréable, tout comme ces thés au citrons servis par les machines à café industrielles et dont le sucre masque l'absence de goût. La scène d'ouverture présente un appartement minable des banlieues ouvrières de paris. La femme reste à la maison pour s'occuper de la maison tandis que le mari végète dans une recherche d'un emploi inaccessible. La femme vient d'apprendre la liaison de son mari avec une esthéticienne du coin. Le roman débute lorsque la femme soumise met son mari à la porte et ça déclenche la dynamique de la narration. Comme d'habitude avec ce genre d'histoire, les plus malheureux ou les plus forts ne sont pas ceux que l'on croit. Les pauvres puisent dans leur misère la force de rebondir et les riches et puissants découvrent en eux une coquille vide. Le seul personnage qui m'a quelque peu surpris c'est la détestable fille ainée du personnage principal. Un rôle complexe et intéressant, un diamant perdu au milieu de la verroterie du livre.
Bref rien de neuf sous le soleil, mais ça ravira le public habituel. Comme ça se lit facilement, je l'ai rapidement expédié.

Il fait froid maintenant, il est temps de remettre du bois dans le feu, peut être de mettre aussi de nouveaux livres sous ma table de chevet, mais un meilleur combustible.

mardi, novembre 25, 2008

Revue de lecture pour en finir avec mes devoirs en retard...

Une revue de lecture copieuse ce mois ci. Je n'ai pas plus lu que d'habitude mais je souhaitais corriger un oubli. En effet, je n'avais pas encore parlé de tandis que j'agonise, le titre aurait du m'inciter à la méfiance. Je me suis presque mort d'ennui avec ce premier roman que je m'apprête à critiquer. Le souvenir pénible de la lecture s'est faufilé dans les rayonnages obscurs de ma mémoire, pour sombrer tranquillement dans l'oubli. Mais peine perdue, je l'ai retrouvé ce petit souvenir mesquin. Après avoir tant souffert à la lecture, je suis bien obligé de l'étaler. C'est une sorte d'exorcisme.
Revenons-en au livre, enfin d'abord à l'auteur, William Faulkner. Outre le fait d'avoir un nom assez évocateur, il fait partie du petit cénacle des prix nobels. Gage de qualité trompeur qui dissimule souvent les autels sanglants d'une idolâtrie snobinarde. Le personnage est également connu pour être le plus grand écrivain du sud des états unis (dixit la quatrième de couverture, vive les éditions folio), son penchant pour l'éthanol sous ses formes liquide ou pour son talent de scénariste. Enfin bref, ce n'est pas pour cela que je cherchais à lire du Faulkner, c'est surtout car le quidam a fondé sa réputation littéraire sur la création d'un compté imaginaire dans le Mississipi qui sert de décor à la plupart de ses écrits.
La description de la misère du siècle passé dans le Mississipi rural, voilà ce qui m'attirait chez Faulkner. J'espérais trouver une intéressante documentation pour mon propre travail d'écriture, dont l'action se déroule également dans les états américains du sud. Je cherchais le chef d'œuvre du romancier, Absalon, Absalon! Je ne l'ai pas trouvé alors par dépit j'ai choisi Tandis que j'agonise.
A ce sujet, un premier coup de gueule contre les éditions folio. Ces sombres éditeurs ont un penchant notable pour la quatrième de couverture fâcheuse. En l'occurrence,elle se contente d'être un extrait du livre. Paresse oblige, l'extrait n'a absolument rien de significatif. En sortant de la librairie avec le livre sous la poche, mis à part l'assurance que l'action se déroulait bien dans l'Amérique rurale, je ne savais rien du contenu. C'est le hasard qui a dicté mon choix, ainsi que la photographie présentée en première de couverture, une magnifique photo noir et blanc d'une famille américaine. Je pourrais aligner les lignes pour parler de cette photographie, le père de famille qui domine la verticale centrale, tranquillement adossé à une colonne de bois en train de rouler une cigarette dans sa salopette de paysan. Tout autour de lui sa famille, visiblement sa femme et ses deux filles fixent l'appareil photo. Les personnages semblent pauvres et démunis mais empreints d'une profonde majesté.
C'est malheureusement le meilleur moment du livre. L'intérieur nous présente effectivement une petite famille américaine vivant dans la misère, mais loin d'avoir cette majesté, les personnages sont présentés dans leur rusticité crasse. L'histoire nous raconte la mort d'Addie Bundren. Non, pas une mort passionnante, ni un crime à résoudre, juste la fin pathétique et morne d'une pauvre femme dans son lit, terrassée par la maladie. La seconde partie du livre se présente comme une farce de mauvais goût avec l'odyssée de la famille qui part enterrer la vieille dame. Une violente tempête à détruit les ponts pour se rendre à la ville alors les chapitres s'empilent pour nous raconter les péripéties du long chemin. Ils s'en passe des choses sur la route, des rencontres et des évènements improbables qui vont transformer l'enterrement en épopée mythique.
C'est très certainement bien écrit. Chaque chapitre nous présente le point de vue de l'un des personnages. Il paraît que c'est Faulkner à inventé cette technique littéraire du "courant de conscience", chacun des personnages avec sa propre perception des évènements, ses préoccupations intimes. Le style d'écriture s'adapte et polymorphe il se transforme d'un chapitre à l'autre. Même si Faulkner est l'inventeur de cette technique, force m'est de constater qu'elle a été reprise avec talent par d'autres. Que les élèves ont très largement dépassé le maitre. Là cela donne une tonalité erratique au récit, cela embrouille le lecteur et c'est surtout profondément soporifique.
Même si au cours du récit sont révélés les secrets des protagonistes, on s'ennuie ferme à la lecture. Et c'est avec soulagement que l'on accueille la dernière page.
Ouf, sauvé. Je crois que l'on ne m'y reprendra plus.

Deuxième petit livre du mois de novembre. Encore un prix Nobel, encore un détestable folio. Il s'agit Des souris et des hommes de John Steinbeck. Je ne peux m'empêcher d'adresser une nouvelle malédiction aux éditeurs. Encore une fois, c'est un extrait de texte présenté dans la quatrième de couverture. Mais cette fois ci, elle révèle une scène clef de la fin du livre. Tout comme ces fâcheux qui révèlent la fin des films à suspense, avec ce genre de confidence qui gâchent le spectacle, la quatrième de couverture a véritablement ruiné ma lecture. Si les prémisses du livre auguraient la conclusion fatale et les premiers chapitres présentaient déjà les minces filaments qui retenaient la lourde épée de Damoclès, je n'en aurais jamais la certitude et ça m'exaspère. C'est d'autant plus rageant que je tient le livre pour véritablement réussi. L'impression que j'ai ressenti donc en lisant le livre c'est d'avoir la certitude du drame à venir. Comme pour un roman tragique déjà lu et relu,on sait que le malheur va s'abattre mais on espère à chaque page que cette fois-ci, ce sera différent.
Contrairement à l'ouvrage précédent, ce livre est beaucoup plus mince, même pas deux cents pages. Le style est beaucoup plus simple, plus direct. Mais surtout contrairement au style de Faulkner, on ne pénètre jamais la conscience des personnages. La subtilité et la richesse de leurs caractères se révèle petit à petit au fil des dialogues. On apprend à connaître les protagonistes comme on le ferait dans la vrai vie, à force de les côtoyer, de leur parler, de découvrir leur vie au quotidien. Malgré leur simplicité et parfois leur grossièreté rustique, ils deviennent profondément humains et attachants. Entre le petit homme débrouillard et rusé et son ami, géant simple et naïf on pressent le drame à venir. Ils travaillent modestement, saisonniers dans les ranches, mais leurs rêves sont trop beaux pour être vrais. La dure réalité finira par les rattraper, les condamnant l'un et l'autre.
Une durable tristesse s'installe lorsque l'on termine le livre face au destin tragique des souris et des hommes. Je m'attendais à trouver une littérature engagée, à la façon des raisins de la colère. Pas du tout. Au contraire c'est une histoire toute simple, mais le pathos la rend si belle. Un livre à lire et à relire.

On change d'univers avec le troisième livre. On quitte la misère moite des campagnes américaines pour trouver les landes froides du Devonshire et les intrigues policières de Sherlock Holmes dans l'Angleterre Victorienne. Dans cet univers feutré de luxe, Sir Conan Doyle conte la légende du chien des Baskerville. Je n'avais lu aucun des romans de Sherlock Holmes et pour cause il sont très peu nombreux, la plupart des aventures du détective et l'enchainement magistral de ses déductions étant plus à leur places dans des nouvelles. Il y a quelques mois j'avais lu une reprise du célèbre personnage avec l'affaire du secrétaire Italien qui m'avait passablement déçu. L'original est souvent réputé meilleur que la copie, et puis je voulais me débarrasser de ce goût amer de la trahison dans la bouche. J'ai donc investi dans ce court roman.
Ai-je trouvé mon salut avec ce livre, pas vraiment. Bien entendu on retrouve la patte de Conan Doyle génial précurseur du roman policier. Mais on sent que l'auteur s'essouffle qu'il reprend à contrecœur son personnage pour satisfaire ses lecteurs. Et comme je le pensais, le support du roman est bien trop long pour que le lecteur soit époustouflé par l'esprit de synthèse du célèbre détective. On trouve donc un compromis étrange du roman d'aventure en suivant les pérégrinations du docteur Watson tandis que son compagnon est retenu à Londres pour d'autres affaires. Et lorsque le détective intervient, c'est pour commenter la difficulté de l'enquête. Ses déductions sont le plus souvent hasardeuses, elles ont perdu l'étincelle de génie qui les caractérisait dans mon souvenir. Ca se laisse lire, c'est même très bien écrit mais quelle amère déception de voir cette idole de mes lectures adolescente rabaissé ainsi.
Et pourtant l'intrigue était prometteuse, une malédiction ancestrale s'acharne sur la noble famille des Baskerville, un chien issu des enfers qui hante les paysages mystérieux des landes du Devonshire. Face au surnaturel, le rationnel Sherlock Holmes mène l'enquête. Sur le papier ça sonne bien, mais en pratique c'est décevant. Le mystère se dissipe en quelques pages, sans que le lecteur soit invité à affuter ses propres déductions. L'enquête se résout enfin dans une scène d'action assez déplacée. Pour une fois, ce n'est pas le cerveau qui triomphe mais les bras armés de revolver. C'est pour le moins frustrant.
Il est impératif que je retrouve les romans de mon enfances, c'est nouvelles qui m'avait passionné afin de découvrir si Conan Doyle s'est véritablement égaré ou bien si c'est moi qui ai vieilli en embellissant un souvenir trompeur.

Hop, pour une fois je suis à jour dans mes revues de lecture. L'esprit libéré, ma cervelle d'oiseau peut enfin s'envoler vers d'autres horizons littéraires.

mardi, novembre 11, 2008

Un oiseau des steppes


Il m'aura fallut du temps pour me résoudre à écrire cette petite revue de lecture. Je vais essayer d'évoquer Le loup des steppes, œuvre onirique phare du romancier de l'entre deux guerre Hermann Hesse.
Ce livre se présente comme un roman traditionnel mais sa dimension philosophique et même mystique transpire au travers du papier. De part la construction même, la première partie du livre n'est qu'une mise en abime et un jeu de miroirs complexe pour présenter le personnage principal, un certain Harry Haller. Un intellectuel petit bourgeois en révolte contre son milieu mais surtout contre lui même. Un loup des des steppes solitaire et perdu au milieu d'une époque qui ne lui correspond pas, ou la société décadente et superficielle s'enivre de rêve de revanche et de destruction. En effet, le contexte de l'Allemagne dans l'entre-deux-guerre teinte d'une noirceur amère le roman. Harry est malheureux mais plus que ça, il se déteste au point qu'il finira par se résoudre au suicide.

Au moment ou il se décide enfin à mettre fin à ses jours, il rencontre son alter égo féminin. Une femme mystérieuse et fatale qui l'initiera aux plaisirs de la vie, de la superficialité et à la frivolité. Mais la jeune femme, derrière les apparences et son insouciance comprend la torture intérieure de Harry, elle ressent la même. Après lui avoir appris à vivre elle lui demandera de la tuer. La toute dernière partie du livre soulève enfin un peu le voile sur les thématiques mystiques annoncées en préambule. Le théâtre magique et les immortels, spectacle réservé aux insensés transparaissaient dès les premières pages, ce n'est que dans le final que Harry pourra s'y joindre et y perdre l'esprit.

Que dire après avoir terminé la dernière page. Je ne sais pas, je suis probablement passé à côté des enseignements du livre. Ce n'est pas forcément grave, au contraire. Par certains aspect ce livre m'a fait penser au cinéma de David Lynch. J'ai ressenti le frisson d'incompréhension, que le discours est tout simplement trop grand pour rentrer dans le support. C'est au spectateur de trouver sa propre vérité. L'important n'est même pas de trouver cette vérité, mais simplement de la chercher. Au fil du voyage initiatique de Harry, c'est le lecteur qui traverse son propre rite de passage.

Intéressant et certainement à lire. Le loup des steppes n'a pas vieilli avec les années.

samedi, octobre 18, 2008

Vol au dessus d'un nid de coucou

J'ai déjà dit tout le bien que je pensais de Denis Lehanne, cet auteur Bostonien que j'avais découvert pendant mes récentes pérégrinations américaines. J'avais également dis qu'il me faudrait peu de temps avant d'y revenir. Et voilà c'est fait. J'ai acheté Shutter Island car cela me démangeait trop. Et encore une fois j'ai passé un très bon moment. Il m'a fallu moins de trois jours pour venir à bout de ce roman.
Il faut dire que la quatrième de couverture est alléchante. Deux marshalls fédéraux se rendent à la fin des années cinquante sur l'ile de Shutter Island dans la baie de Boston. Leur mission, retrouver une patiente qui s'est enfuie de l'hôpital psychiatrique. Mais sur une ile, elle ne peut pas aller bien loin, si ? L'affaire se corse lorsqu'un ouragan arrive sur l'île, que l'électricité disparaît tombe et que les malades mentaux criminels et dangereux s'enfuient. L'enquête mènera les deux marshalls très loin dans le labyrinthe de la folie.
Changement de style radical par rapport à un dernier verre avant la guerre. Terminé la politique et le racisme. Terminé les luttes de pouvoirs et les sévices sexuels. On perd l'ironie et le cynisme, mais on trouve une histoire teintée de mystères et de peurs. L'écriture change aussi un peu, le style flamboyant disparaît au profit d'un style plus simple plus vivant et plus tourné vers l'action.
Au final, même si de mon point de vue ce livre n'est pas aussi bluffant que le dernier verre. Il se laisse lire et même mieux que ça, il entre au panthéon des très bon livres.
Je ne peux pas en dire grand chose de plus sous peine de révéler les secrets. La seule chose, assez rare c'est que je me suis moi même fait piéger et c'est toujours un délice de se faire surprendre par un écrivain.

Un oiseau des iles

jeudi, octobre 16, 2008

New York brûle-t-il ?

Octobre 2008, la réalité rattrape et dépasse la fiction. L'économie mondiale anéantie par des années de spéculation et de vie à crédit. C'est bien tout le problème avec les crédits, il faut un jour les payer. Nous vivons des jours sombres qui montrent bien le danger d'une fuite en avant éternelle. On sent qu'avec la crise américaine, l'histoire tremble. Peut-être qu'une nouvelle page va se tourner. Ou peut être que les harpies d'un capitalisme abrutissant trouveront une autre solution pour endormir la population pour encore quelques années. Je ne suis pas devin, encore moins économiste et les hautes sphères de la finance internationale m'échappent. Je ne me hasarderais donc pas à établir un pronostic. Je me contenterais de parler du livre que j'ai lu à mon retour des amériques. Le bûcher des vanités présente une analogie troublante avec la situation actuelle.

Bien sur l'échelle du livre se veut plus restreinte, c'est la déchéance d'un homme qui s'étale pendant près de milles pages. C'est aussi sa chute du firmament de Wall Street, des salons dorés ou les maîtres manipulent les puissants leviers qui font tourner le monde. Aujourd'hui il semblerait que ces maîtres du monde se retourne piteusement vers l'illusion honnie de l'état providence. Le gouvernement fera tout pour les sauver, ces braves financiers quitte à sacrifier un peu plus l'avenir du peuple. Dans ce beau pays de la liberté ou les gens sont libres de travailler au fast food passé soixante dix ans, ou les rues sont un toit normal pour les misérables, ou les mères de famille sont obligées de cumuler les emplois sous payés pour pouvoir survivre.
Enfin bref, ce n'est pas vraiment l'objet de mes propos. Dans le bûcher des vanités, Tom Wolfe ne nous expose pas seulement la fragilité du capitalisme derrière son armure d'orgueil. Il détaille les rouages du pouvoirs. Pas seulement le pouvoir superficiel qui émane de la célébrité et du luxe. Ce monde de l'illusion dans lequel baigne le protagoniste principal du roman. Le financier arriviste et talentueux de Wall Street va découvrir un autre pouvoir qui va le détruire. Un soir alors qu'il ramenait sa ravissante maîtresse chez lui, il va se tromper de route et se retrouver par malchance dans les quartiers malfamés du Bronx. Luttant pour s'enfuir d'un guet-apens, il va par mégarde écraser un noir. C'est alors que les rouages du pouvoir vont se mettre à le broyer. Les luttes d'influence terribles entre la communauté noire qui saisit le prétexte du racisme pour accuser une certaine justice blanche réputée aveugle, sauf quand il s'agit de protéger les siens. Justice qui pour se dédouaner et arranger les visées électorales ou amoureuses de ses personnels va mettre un excès de zèle à trouver l'homme de Wall Street et à briser ce symbole de l'intouchable. Entre les deux, le troisième pouvoir de la presse distribue les cartes et séduit ou punis ses favoris.
En bref, c'est une oeuvre majeure que ce bûcher des vanités qui brûle consciencieusement tous les miroirs et artifices de la coquetterie pour montrer une vérité crue et douloureuse. Bien sûr le livre n'est pas exempt de défauts, notamment avec la manie de l'auteur qui cherche à restituer phonétiquement tous les bruits où même les accents des personnes. Bien sûr certains aspects psychologiques des personnages ne sont pas crédibles, bien sûr certaines allégories sont trop longues. Mais malgré tout et malgré sa longueur le livre se dévore d'une seule traite.
Derrière ce monument, on découvre les facettes de la vie New Yorkaise dans toutes leurs complexités et leurs artifices.
C'est l'une des meilleures surprises de l'année pour moi. Avec la découverte de Dennis Lehane comme auteur de chevet. Je recommande plus que chaleureusement pour ceux qui veulent découvrir la culture américaine, sulfureuse et facinante.

Un oiseau perché à Central Park

dimanche, septembre 14, 2008

Des villes et des livres

Me voilà encore dans un train. Non pas le transport habituel vers les affres de la vie active. Pire, le train dans lequel j'écris ces lignes me ramène à trop grande vitesse chez moi après trois semaines de congés. C'est la fin des vacances et la grisaille météorologique s'accorde à mon caractère du moment.
Difficile de ne pas avoir le spleen après un congé de trois semaines et une virée dans les grandes villes du nord est américain. Montréal que je connaissais déjà un peu, Boston, New York et Washington. Entre chacune des villes, des heures de transport, et pour cause nous nous déplacions en bus. Pour moi le transport est synonyme de lecture mais avant de partir le problème récurent revenait à la charge, que choisir ?
J'ai donc tenté une nouvelle approche, la lecture touristique. Première étape, trouver des livres dont l'action se déroulait dans les villes visitées. Deuxième étape, les lire avant d'arriver pour créer un air de déjà vu teinté de nostalgie.
Au final ça n'a pas trop marché pour le côté tourisme. Par contre en sortant de mes habitudes littéraires, j'ai découvert de vraies perles.

Première étape de notre périple, Boston, ville chargée d'histoire, berceau des états unis. Premier livre, Un dernier verre avant la guerre de Denis Lehane.
J'aurais du me méfier, le quidam a vu trois de ses ouvrages adaptés au cinéma. Bien sûr Mystic River par le génial Clint Eastwood, mais aussi Gone Baby gone et bientôt Shutter Island. J'aurais du me méfier de ce nom que je ne connaissais pas, je me suis fait avoir.
Littéralement bluffé par ce livre, me voilà contraint d'ajouter un nouveau romancier à mon panthéon des écrivains préférés. Un véritable modèle pour quiconque veux écrire.
Ses personnages sont torturés, souvent marqués à vie par une enfance difficile. Mais ils restent toujours crédibles sans sombrer dans la caricature. Chez Denis Lehane, il n'y a pas de bons ou de méchants, juste une infinie palette de clair-obscur. Je ne rendrais pas hommage à ce superbe livre en le résumant maladroitement à une simple guerre des gangs. Il y a tellement plus, des pistes de réflexions sur le racisme ordinaire et sur la violence, sur la drogue et la pauvreté, sur l'atrocité des sévices sexuels sur mineurs, sur l'inégalité des chances au pays du rêve américain...
Le livre débute par une enquête de routine confiée à un couple de détectives privés, à savoir retrouver la trace d'une femme de ménage noire, disparue en emportant des documents confidentiels. Très rapidement l'affaire tourne au drame social et va déchirer la ville de Boston. L'histoire est ambitieuse mais remarquablement bien servie. L'écriture est admirable, à la fois drôle et caustique, elle devient par moment sombre et dramatique tout en gardant une redoutable efficacité pour décrire les scènes d'action et les combats.
J'ai véritablement passé un bon moment à lire ce livre et c'est de la très bonne came. Pour preuve, je suis déjà en manque.
Enfin bref, avant d'arriver à Boston j'avais déjà fantasmé sur la ville et arpenté son bitume en compagnie des deux enquêteurs.

Deuxième ville visitée, New York. Je n'avais que l'embarras du choix pour la lecture. Je me suis arrêté sur le fameux bûcher des vanités de Tom Wolfe. Comme je ne l'ai toujours pas terminé ma critique viendra plus tard.

Troisième ville, Washington, la capitale des états unis. Troisième livre, Drama City de George Pelecanos. Le romancier s'est spécialisé dans la ville de Washington et y base tous ses livres. Alors que dans la plupart de la littérature Washington est le symbole du pouvoir, des manipulations de masses et des diverses théories du complots, George Pelecanos choisi d'aborder la ville sous l'angle du polar noir dans les bas quartiers.
Malheureusement, le roman ne va pas beaucoup plus loin qu'un simple polar, en fait à bien y réfléchir ce n'est même pas un polar. Il s'agit plutôt d'une tranche de vie de personnages dans les bas quartiers de Washington. Le personnage principal est attachant, c'est un ancien taulard qui tente de retrouver sa place dans la société avec un boulot dans une société protectrice des animaux. On le voit qui essaie de ne pas retomber dans la spirale de la drogue et de la violence. Ca se laisse lire, les personnages sont bien campé et réaliste, mais c'est loin d'être exceptionnel. L'écriture est quelconque. Un roman de gare, vite lu et encore plus vite oublié.




Je termine cette petite revue avec Cellulaire de Stephen King. Après avoir dévoré Ecriture, il me tardait de retrouver ce maître de la littérature populaire américaine. J'avais saisi le prétexte d'une intrigue se déroulant à Boston pour m'acheter le livre. Quelle déception ! Le roman est relativement épais avec près de six cent pages mais l'intrigue reste pitoyablement mince.
Les premières pages sont racoleuses et dramatiques avec la description de la fin du monde, rien de moins. Par une après midi ensoleillée, tous les téléphones portables du monde se mettent à carillonner à l'unisson. Malheur à celles et ceux qui décrochent, ils deviennent immédiatement fous furieux. Quelquefois suicidaires, la plupart du temps meurtriers mais toujours violents. Toute trace de civilisation dans le cerveau balayée par une rage primaire et une brutalité sanguinaire. Nous suivons alors les aventures d'un petit groupe de rescapés qui tentent de survivre dans la catastrophe. Peu à peu une conscience collective émerge des masses décérebrées et une nouvelle civilisation émerge. Un semblant d'organisation apparaît ainsi que des pouvoirs télépathiques grandissants chez les post-humains. Ces "siphonés" entament alors une guerre totale contre le restant de l'humanité.
Présenté comme cela, l'histoire est alléchante, le livre l'est malheureusement beaucoup moins.
Dans la forme déjà c'est catastrophique. C'est atrocement mal écrit ou bien mal traduit, probablement un peu des deux. Le style est pauvre et sans imagination. Seul avantage, ça se lit vite. Stephen King s'improvise pasteur de l'easy-reading en quelque sorte.
Passons au fond maintenant, ce n'est pas mieux. On sent rapidement que l'histoire ne suit pas un scénario réfléchi et que l'intrigue se forge au hasard des rencontres du petit groupe de survivants. Quand à la fin, elle est grand-guignolesque. Que le lecteur potentiel se rassure, l'humanité est sauvée in extremis.
Comme souvent avec Stephen King, la cause du glissement vers l'horreur n'est jamais expliquée, on se contente des hypothèses des protagonistes. Attentat terroriste ? Expérience qui a mal tournée ? Événement surnaturel ? On n'en saura pas plus et c'est diablement frustrant.
Enfin pas si frustrant que cela lorsque l'on suit les théories informatiques du romancier et son analogie avec la psyché humaine. Les explications sont au mieux erronées et les tentatives de vulgarisation par la bouche d'un gamin de huit ans font au choix sourire ou se lamenter l'homme de science.
Enfin bref, un roman à éviter. Je me demande si c'est une exception ou bien si tous les livres du quidam étaient déjà aussi mauvais lorsque je les dévorais à l'adolescence.

samedi, août 16, 2008

Sherlock Holmes ressuscité

Après une incursion dans le futur désenchanté de Cory Doctorow, je retourne à l'Angleterre Victorienne. Point d'attaque de train d'or ce coup-ci, mais encore une affaire criminelle à résoudre, du côté de la justice ce coup-ci.
Je retrouve le personnage mythique de Sherlock Holmes confronté à l'affaire du scrétaire italien. Il ne s'agit pas d'un roman perdu de Conan Doyle, mais d'une ouvre récente écrite par le talentueux Caleb Carr.
Cet auteur m'avait ébloui dans ses premiers romans, l'Aliéniste et l'Ange des ténèbres avec son personnage de Lazlo Kreizler. Singulier pionner de la psychologie qui démasquait les tueurs en série dans le New York de la fin du XIXeme siècle.
Alors la perspective de voir Caleb Carr reprendre l'illustre enquêteur consultant avait tout pour me réjouir. Et bien finalement non. Le livre n'est pas singulièrement mauvais, Sherlock Holmes reste fidèle à son intelligence et ses magistrales déductions. Mais on sent que le livre n'a pas la patine magnifiée par les années de la saga de Conan Doyle. C'est faiblard et ne supporte pas vraiment la comparaison.
L'enquête policière est plus classique, sauf que Sherlock Holmes se trouve dans le terrain dangereux des intrigues autour de la personnalité royale. Ca surprend pour un Sherlock Holmes, d'autant que la confrontation avec son frère Mycroft n'était pas vraiment indispensable. Autre chose, l'auteur se complaît à valoriser le personnage de Watson et d'insister sur son passé héroïque tandis que Watson dénigre son ami. L'effort est louable pour ce pauvre faire-valoir mais ça dénature l'oeuvre. L'intrigue est passablement intéressante par son lien avec l'histoire de la reine d'Ecosse Marie Stuart. Mais on ne retrouve pas les trésors de logique habituellement employé par Holmes. Au contraire, l'histoire se résous par à coup, arrivé à la moitié du livre, le lecteur connaît tous les tenants et aboutissants de l'affaire. Le reste est inutile voir ennuyeux.

En résumé, ça se laisse lire. Mais pour tous les fans de Sherlock Holmes, préférez l'original. Je vais de ce pas me relire le chien des Baskerville d'ailleurs.

vendredi, août 15, 2008

Magic Kindom, deux minutes d'arrêt

Fringale de lecture. Après la traversée du désert qu'a représenté pour moi la lecture des Bienveillantes, j'ai besoin de me changer les idées, de jouer au touriste spatial japonais. Tous le jours de découvre un autre univers et je m'extasie, mais je ne reste jamais longtemps en place, le temps de prendre quelques photos puis je repart.
Aujourd'hui, mon bus japonais c'est arrêté devant le manège enchanté de Disneyworld. On a visité la vision du futur que présente Cory Doctorow. Dans la dèche au Royaume Enchanté, tel est le titre du livre qui m'a occupé pendant quelques heures. Même pas deux jours, c'est dire si c'était un passage express.

Bon le livre n'est pas mauvais en soi, je l'ai lu d'une traite. Mais par contre j'ai redécouvert les aspects désagréable d'une science fiction à l'ancienne. Pourtant l'auteur est tout jeune et c'est son premier roman, mais il se croit obligé pour rendre crédible son univers d'y immerger le lecteur. En effet, le point de vue du protagoniste est ancré dans son monde. Nouveaux termes, nouveaux concepts, nouvelles technologies sont utilisés sans explications et ça pique un peu aux yeux pendant les cinquante premières pages.
Au cours du livre, le narrateur nous raconte petit à petit comment le monde que nous connaissons en est arrivé là. Et enfin le lecteur peut s'émerveiller devant le bon côté de la science fiction à l'ancienne. Ces romans ou l'on découvre une utopie sociale radicalement différente de notre mode de vie, où les fondements d'une société imaginaire servent à introduire une réflexion sur le réel.
En l'occurrence le contexte de l'histoire, c'est notre bonne vieille terre dans quelques années. Une société nommée Bitchun est devenue omnipotente grâce à la technologie qu'elle propose, à savoir l'immortalité, sympa non ?
Le fondement c'est d'être capable de sauvegarder l'être humain et de le ré-implanter dans un nouveau corps, à priori un clone. Et comme la mort n'existe plus, les gens peuvent explorer les possibilités d'avoir un corps plus jeune, plus vieux ou modifié génétiquement. Dans une telle société ou tout le monde peut vivre éternellement, ou le plus miséreux peut prétendre à la vie éternelle gratuite, ou la technologie se charge des tâches pénibles, le concept même d'argent a disparu. Remplacé par la notion de whuffie qui est la grosse invention de Cory Doctorow.
Ce terme regroupe les notions de reconnaissance, de réputation et de statut social. Ce sont des points que les personnes accumulent à mesure qu'il se font apprécier par leurs concitoyens. Et plus le score whuffie est important, plus le personnage peut prétendre à des biens et des services élevés. C'est un peu comme les discothèques branchées parisiennes le samedi soir, il vaux mieux être riche et célèbres pour pouvoir avoir le droit d'entrer.
Le principe est très intéressant et mieux que ça il devient crédible. Dans un tel monde ou l'on a plus besoin de travailler pour vivre décemment, les gens travaillent pour rendre service aux autres et ainsi augmenter leur score de whuffie et ainsi s'élever dans la société. Le jeu devient encore plus intéressant lorsque des groupes de personnes s'associent sous la forme d'adhocraties pour prendre le contrôle de structures pour le bien de tous et surtout pour augmenter leur réputation commune en rendant le monde "meilleur" ou plus intéressant.
Nous suivons ainsi les aventure d'un homme s'étant investi dans les attractions du Royaume Enchanté de DisneyWorld. Le narrateur, entrainé dans un sombre complot pour la conquête du parc va tout perdre, son accès au réseau omnipotent de la société bitchum, l'amour de sa vie et sa réputation.

Voilà ce que l'on peut raconter du roman sans trop déflorer l'intriques. Passé la complexité de l'immersion du début, ça se lit bien, c'est rafraîchissant et ça mène à de vraies réflexions. Alors quoi, c'est un bon livre ? En tout cas moi je n'ai pas trop accroché. Le livre est certes intéressant mais il y aurait eu je pense beaucoup mieux à faire.